Un « ambitieux incapable » quand ce n’est pas un « responsable du désordre » ou « un incompétent », « tenant de l’ordre colonial ». Ainsi est décrit Emmanuel Macron, habillé pour l’hiver par le président turc, Recep Tayyip Erdogan, agacé de devoir composer avec les patrouilles des Rafales et autres frégates françaises dans son projet d’exploration des ressources gazières en Méditerranée Orientale. « »le peuple turc qui est un grand peuple mérite autre chose », rétorque le président français, qui reproche à son ennemi un « expansionnisme » à tout va.
La cause de l’escalade verbale est entendue. Paris apporte son soutien inconditionnel à Athènes, l’ennemi héréditaire de l’ex empire Ottoman, favorisé par les auteurs du traité de Sèvres du 10 août 1920 qui consacrait la séparation de la Turquie d’avec ses colonies arabes et africaines, et le droit international de la mer consacré par la Convention de Montego Bay (1982) qui lui accorde jusqu’à une petite île située à moins de 2 kilomètres des côtes de la Turquie.
Ce caillou spongieux intéresse particulièrement Ankara non signataire de la convention internationale sur le droit de la mer et tentée par l’usage de la force. Dans cette escalade face à la Turquie, Paris risque de se retrouver seule, sans le soutien de ses alliés de l’Union Européenne, encore moins de l’Otan dont elle et la Turquie sont membres. L’on se rappelle qu’en Syrie, les américains ont tourné le dos à un moment crucial, laissant la France face à la Turquie, qui y a établi sans coup férir une zone tampon pour contenir les ambitions indépendantistes des Kurdes.
De même en Libye, alors que le Maréchal Khalifa Haftar, sponsorisé par Paris, Washington (qui s’est retirée sur la pointe des pieds) et les Emirats-Arabes Unis, avançait vers Tripoli, le voilà qui tombe sur l’armada turc venue, selon la version officielle usitée par Ankara, défendre le droit international, c’est à dire le gouvernement de Tripoli, reconnu par l’ONU. Sur ce dossier libyen, la France, membre du Conseil de Sécurité, s’est retrouvé du mauvais côté du droit en s’alliant avec un Maréchal qui veut renverser un gouvernement installé par une résolution onusienne , murmurent certaines chancelleries. Or là aussi, les américains qui soufflent le chaud et le froid ont pris à temps leurs distances avec l’encombrant maître de Benghazi.
Aujourd’hui, la Méditerranée Orientale offre un troisième théâtre d’affrontement technique, tactique et diplomatique entre Macron et Erdogan. Là encore, la Turquie est parvenue à obtenir de l’Allemagne une position de neutralité qui l’appelle à prêcher « la retenue » et le « dialogue » là où Paris aurait souhaité une sorte d’union sacrée. Du coup, l’Europe joue la prolongation en reportant à début octobre un sommet devant sanctionner Ankara. C’est bien évidemment mal connaître la Méditerranée Orientale pour un Emmanuel Macron, qui se rêve en porte-étendard de l’Europe (et de sa civilisation judéo-chrétienne ?) face à l’islamo-nationalisme turc. Mais entre déploiement de rafales et de patrouilleurs, le président français pourrait bien gêner ses alliés européens inquiets de sa puissance militaire. « Macron, Napoléon de la Méditerranée », titrait début septembre le bien inspiré quotidien Frankfurter Rundchau.
Pendant ce temps à Paris, il se dit que le président français, pas loin de Nicolas Sarkozy dans sa vision du Proche et du Moyen-Orient, accorde peu d’écoute à ses vieux diplomates et à ses experts en relations internationales contrairement à ses illustres devanciers, Jacques Chirac et François Miterrand. « L’Allemagne a un poids économique, une capacité économique à dissuader les Turcs beaucoup plus importante que ne l’est la démonstration militaire française », soulignait for à proposDorothée Schmid, spécialiste de la Turquie à l’Institut français des Relations internationales (Ifri), devant les députés français mi-septembre. Si l’Elysée écoutait…
Un commentaire
“L’Allemagne a un poids économique, une capacité économique à dissuader les Turcs beaucoup plus importante que ne l’est la démonstration militaire française”
Tres bien, mais Qu attends alors l Allemagne pour dissuader les turcs ?
La réalité c est qu elle est pétrifieee de devoir réagir.
Il n y a guerre que la France qui réagit « heureusement » et cela ne plait pas du tout au sultan kebab