Alors tout puissant ministre italien de l’Intérieur, Matteo Salvini avait refusé pendant six jours de laisser débarquer une centaine de migrants recueillis par un navire des gardes-côtes italiens, en attendant que les autres pays de l’Union européenne s’entendent sur leur accueil. C’était en juillet 2019 dans ce qui constituait une contravention aux conventions et traités en matière d’assistance des personnes en danger, de sauvetage des personnes et, tout simplement, aux principes mêmes de la démocratie.
Mais la force des nations démocratiques c’est de tenir ferme, en dépit des bouffées de chaleur d’extrême droite, revenant toujours à la règle de droit. Le dirigeant d’extrême-droite italien qui vu son immunité levée en février dernier s’est présenté ce samedi 3 octobre devant un magistrat sicilien pour tenter de le convaincre de ne pas le traduire en justice « pour séquestration de migrants en mer », un crime passible de 15 ans de prison. Sur le plan politique, Matteo Salvini entend faire de son audience une tribune politique, appelant ses partisans à se rassembler à Catane pour le soutenir.
« J’avance la tête haute, avec confiance, convaincu d’avoir toujours agi pour la défense de notre territoire et la sécurité des Italiens », a écrit Matteo Salvini sur son compte Twitter à son arrivée au tribunal. L’audience se déroule à huis clos. Selon le journal Corriere della Serra, le magistrat en charge du dossier, Nuzio Sarpietro, pourrait décider d’interroger le président du Conseil, Giuseppe Conte, avant d’ordonner ou pas la tenue d’un procès. Le système judiciaire italien prévoit une audience préliminaire devant un magistrat au cours de laquelle le parquet et la défense exposent leurs arguments. Le juge décide ensuite du renvoi en justice ou non du mis en cause. « Je plaiderai coupable d’avoir défendu l’Italie et les Italiens », disait Matteo Salvini. Maintiendra-t-il sa rhétorique devant le juge ? Les paris sont ouverts.
Cette audience apparaît dès lors importante, devant déboucher sur la criminalisation des décisions politiques des prétendues démocraties qui ont laissé des milliers de migrants périr en Méditerranée. D’aucuns crieront, certes, à la république des juges mais dans l’ensemble il s’agit d’un rappel à l’endroit des partis d’extrême droite sur la délimitation entre ce qui est permis et ce qui ne l’est pas. Les ennuis judiciaires de Matteo Salvini pourraient se poursuivre avec la tenue d’un procès similaire à Palerme, en Sicile. L’homme politique est, là aussi, accusé d’avoir bloqué pendant 19 jours à la mi-août 2019 le navire humanitaire Open Arms au large de Lampedusa. A noter que plus de 20 000 migrants sont morts en Méditerranée depuis 2014, selon les Nations unies.