Acquitté en janvier 2019 par la Cour pénale internationale (CPI) des charges de crimes contre l’humanité qui pesaient sur lui, Laurent Gbagbo suit de très près l’évolution du contexte politique ivoirien tout en observant sa liberté conditionnelle à Bruxelles, dans l’attente d’un éventuel procès en appel.
Domicilié chez sa seconde épouse Nadiana Bamba dit «Nady», avec laquelle il s’est marié traditionnellement en 2001, et leur fils David Al Raïs, l’ancien président a été tenté à deux reprises, ces dernières semaines, de s’adresser à ses partisans par le biais d’un message enregistré à l’approche de la présidentielle du 31 octobre. Il s’est ravisé, mais continue de mûrir sa réflexion tout en constatant la montée des tensions dans son pays. Selon les informations de Financial Afrik, il consulte régulièrement ses principaux collaborateurs par téléphone dans l’éventualité de s’exprimer publiquement et officiellement auprès de tous les Ivoiriens au regard de son statut d’ancien chef d’Etat.
Parmi ses principaux interlocuteurs au quotidien, figurent Assoa Adou, compagnon de route historique et premier relais à Abidjan. Avant l’apparition de la Covid-19, le secrétaire général du Front populaire ivoirien (FPI) se rendait régulièrement à Bruxelles pour des séances de travail ou pour assister à des rencontres stratégiques comme celle organisée, le 29 juillet 2019, dans la capitale belge, avec Henri Konan Bédié. En janvier, juste avant l’émergence de la l’épidémie mondiale, le fondateur du FPI s’était entretenu avec Pascal Affi Nguessan, à la demande – pressante- de ce dernier. L’ex-premier ministre a sollicité une seconde rencontre restée sans réponse à ce jour.
Par ailleurs, Laurent Gbagbo recevait chez lui à rythme régulier un carré d’amis restés fidèles emmené par Guy Labertit, ex-responsable Afrique au Parti socialiste (PS) français et le professeur en droit public Albert Bourgi. Les anciens chefs d’Etat Jerry Rawlings (Ghana) et Thabo Mbeki (Afrique du Sud) prennent également de ses nouvelles. En revanche, et contrairement à ce qu’il laisse entendre depuis son exil parisien, Guillaume Soro n’a eu qu’une seul fois Laurent Gbagbo au téléphone, entretien au cours duquel l’ancien président de l’Assemblée nationale ivoirienne a fait amende honorable tout en présentant ses excuses pour les troubles causés par la crise politico-militaire (2002-2011).
Outre Assoa Adou, Laurent Gbagbo, qui n’évoque jamais Alassane Ouattara dans ses conversations, est en contact constant avec son ex-ministre (Travail, Fonction publique) Hubert Oulaye, actuel président du comité de contrôle du FPI et autre figure de sa garde rapprochée en qui il a toute confiance. Son conseiller Bernard Houdain se trouve également bien placé dans son agenda par ailleurs rempli à ras bord de demandes d’interviews de médias nationaux et internationaux. Tout en servant de relais de Paris, l’avocate Habiba Touré entoure, quant à elle, les procédures d’obtention d’un passeport. Signe de la volonté des autorités d’Abidjan d’empêcher la délivrance de ce document, l’ancien chef d’Etat s’est vu refusé un passeport diplomatique demandé auprès du ministère ivoirien des Affaires étrangères. Un autre dossier afin de recueillir un passeport ordinaire déposé à l’ambassade de Côte d’Ivoire en Belgique ne reçoit aucune réponse, le consul en poste se retranchant derrière l’attente d’instructions d’Abidjan.
Laurent Gbagbo se trouve donc apatride. Une situation d’autant plus ubuesque que son statut d’ancien président est pleinement reconnu par les autorités ivoiriennes. Sa non-démission en tant que membre du Conseil Constitutionnel a été l’un des principaux arguments utilisés par la Commission électorale indépendante (CEI) pour invalider sa candidature au scrutin du 31 octobre. S’il n’a fait aucune demande en ce sens, plusieurs pays africains lui ont proposé de lui délivrer le précieux sésame. Toutefois, Laurent Gbagbo n’entend pas aller dans un autre pays, même africain, avant de regagner la Côte d’Ivoire où il entend prioritairement se recueillir sur la tombe de sa mère Marguerite Gado, décédée en octobre 2014 alors qu’il était en détention, et sur celle d’Abdoudramane Sangaré, ami de cinquante et gardien du temple FPI disparu en novembre 2018, avant de repartir dans l’arène politique. Mais encore faudrait-il que sa condamnation à vingt-ans d’emprisonnement, début 2018, dans l’affaire du braquage de l’Agence nationale de la BCEAO, pendant la crise post-électorale de 2011, soit levée.
Un commentaire
Excellent article …très fourni en détails d’infos
Le politique aguerri reste tapi dans l’ombre…dans la perspective d’un éventuel , probable !!! retour sur la scène politique : Celle ci est son souffle de vie .