Selon l’UNESCO, moins d’un quart de la population d’Afrique a accès à Internet. Le domaine de l’enseignement est encore plus frappé par cette inégalité d’accès depuis la crise aggravée du COVID. Depuis plusieurs mois, les établissements d’enseignements supérieurs sont impactés par la COVID-19. Alors que plusieurs millions d’étudiants à travers le monde sont concernés, l’Afrique peut profiter de cette parenthèse troublée pour y tirer son épingle du jeu.
Derrière chaque malheur s’y cache un rayon d’espoir. L’Afrique peut profiter de cette crise en permettant à ses établissements d’enseignements supérieurs de se réinventer sur leur fonctionnement.
Les problèmes étaient nombreux. Certains d’entre eux étaient d’ordre conjoncturels en raison de la forte augmentation de la population estudiantine alliée à un manque d’infrastructures et à de faibles moyens financiers.Il faut ajouter à cela les difficultés sur le plan de l’insertion sociale des étudiants. Dans un tel contexte, les établissements encaissent de plein fouet le violent choc d’une crise sanitaire aussi imprévisible qu’affligeante et sont dans l’incapacité de réagir, tétanisés qu’ils sont par un quotidien fort déprimant.
La crise sanitaire liée au nouveau Coronavirus (COVID-19) était imprévisible. Cependant, les établissements les mieux organisés et structurés ont su y faire face en apportant une réponse technologique adaptée. A l’heure du numérique et des réseaux sociaux, les structures ont imposé des dispositifs de formations à distance. L’OCDE a relevé dans ses récents rapports une bonne adaptation des pays membres. 8 universités sur 10 de ces pays avaient mis en place des systèmes de formations à distance opérationnels.
Jusqu’ici, les établissements d’enseignements supérieurs sur le continent avaient systématisé le présentiel comme unique mode d’enseignement.
L’obstination en faveur du mode ‘présentiel’ dans certaines universités va ainsi à contre-courant de ce qu’on observe sur le reste de la planète. Bien que l’e-learning soit en pleine progression sur le continent avec un marché estimé à près de 300 millions de dollars, selon les spécialistes: il faut bien dire qu’il reste encore assez marginal par rapport à la prépondérance du mode présentiel. Il s’agit d’un important challenge à relever pour le continent qui doit accueillir chaque année cinq millions de nouveaux diplômés sur le marché du travail.
Changer ce vieux paradigme, c’est réaliser un grand saut vers l’inconnue par l’innovation et l’expérimentation. La formation à distance est une forme d’enseignement qui n’oblige pas la présence physique d’un enseignant et des apprenants dans une classe physique. De manière virtuelle, elle est accessible où que l’on se trouve, en présence des autres participants ou non.
Il existe deux formes de formation à distance.
Il y a la formation à distance dite synchrone : il s’agit d’une classe virtuelle qui se déroule en temps réel. Les apprenants assistent en direct à une visio-conférence ou audioconférence selon un horaire défini. Enfin, la formation à distance dite asynchrone connaît aussi un réel succès. Les cours ont lieu en différé. Les apprenants ont accès aux cours en format PDF ou vidéo accessible sur la plate-forme des cours en ligne de leur établissement. Et il faut dire que sur cet aspect, certains ministères africains de l’Education ont innové en mettant en œuvre des programmes d’éducation des enfants en contexte de crise. Nous avons tous été témoins de cette expérimentation d’enseignement à distance réalisée. Ce dispositif d’enseignement à distance consiste à dispenser les cours sur des chaînes de télévisions et des radios publiques ou privées nationales et/ou locales. Dans le cas du Burkina Faso, l’opération a mobilisé sept chaînes de télévisions et une cinquantaine de radios pour diffuser des contenus aux élèves sur l’ensemble du territoire. Dans plusieurs pays, ce dispositif a permis à de nombreux enfants de suivre des cours et compléter leur programme de formation de l’année scolaire.
Si un ministère peut tenter ce genre d’expérimentation à l’échelle d’un pays,les universités et grandes écoles devraient aisément leur emboîter le pas.
« Osons espérer que demain sera meilleur »
Ce slogan d’un éminent homme politique burundais peut s’appliquer au monde universitaire africain pour les établissements qui auront profité de l’opportunité que leur offre paradoxalement la crise sanitaire pour innover et se réinventer.
Si les établissements privés sont avant-gardistes car ils ont implanté des activités pédagogiques malgré la crise sanitaire. Certains offrent des solutions basiques consistent à envoyer des cours en ligne via des supports digitaux. D’autres, plus robustes et mieux organisés, offrent des infrastructures et solutions plus professionnelles, qui prennent en compte à la fois la formation synchrone et asynchrone à travers des plate-formes dédiées.
Ainsi, un étudiant de Bacodjocoroni (Bamako) n’aura plus besoin de se lever à 5 heures du matin pour se rendre à l’université pour y trouver une place dans l’amphithéâtre. Au contraire, il restera tranquillement chez lui et se connecte à loisir sur la plate-forme des cours en ligne de son établissement pour télécharger les supports des cours puis les suivre, aux horaires indiqués en live par visioconférence. Même si les questions de fonctionnements administratifs, de gestion de carrières des enseignants restent existentielles, il n’en demeure pas moins que les ressources générées par cette optimisation fonctionnelle du cadre d’enseignement, pourrait être une partie de la réponse de l’insuffisance des moyens financiers de ces établissements.
Cependant, la formation à distance devrait prendre encore un essor plus important pour la diversification des moyens de diffusions. Grâce aux investissements qui devraient graduellement augmenter, les établissements pourraient se réinventer et s’équiper en outils informatiques et audiovisuels de pointe potentiellement délivrés par des prestataires spécialisés pour les accompagner dans cette révolution numérique. En Afrique, une véritable révolution est en marche à condition qu’un véritable cadre juridique et législatif soit mis en place avec une vraie culture du numérique permettant une démocratisation des accès aux tablettes. Mais l’optimisme est de rigueur dans un continent qui concentrera 50% de la croissance économique et technologique mondiale.