- Tony Blair : « Nous avons les mêmes problèmes, mais ce que nous avons aussi, c’est une situation d’urgence, dont l’ampleur est devenue considérable. »
- Akinwumi Adesina : « L’agriculture offre à l’Afrique ses meilleures perspectives d’industrialisation… Le tout est de savoir comment l’Afrique peut augmenter sa productivité agricole et déployer des technologies intégrées dans les zones rurales. »
« La pandémie de Covid-19 a révélé les défis et les possibilités propres au développement de l’Afrique », a déclaré, lundi, l’ancien Premier ministre de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Tony Blair, lors d’une conférence virtuelle organisée par l’Institut africain de développement (ADI) à Abidjan.
« Nous avons les mêmes problèmes, mais ce que nous avons aussi, c’est une situation d’urgence dont l’ampleur est devenue considérable […]. Il ne s’agit pas d’un signal d’alarme, mais plutôt d’un coup de semonce pour nous pousser à agir », a-t-il insisté.
Tony Blair s’exprimait lors d’une conférence en ligne sur le thème : « Reconstruire en mieux dans l’Afrique de l’après Covid-19 : le rôle des technologies et de la gouvernance » organisée dans le cadre du cycle de conférences « Kofi A. Annan ».
Lancé en 2006, ce cycle de conférences de l’ADI, entité de la Banque africaine de développement, porte sur le développement en Afrique et dans le monde et couvre un éventail de sujets parmi lesquels l’économie, les finances, l’intégration régionale, le développement humain et l’environnement. Ces conférences servent de plateforme à des personnalités pour un échange d’idées sur les politiques à mettre en place face aux enjeux du développement en Afrique.
Plus de 4 500 délégués du monde entier, notamment des représentants de gouvernements, des gouverneurs et des directeurs exécutifs du Groupe de la Banque, des membres de la haute direction de la Banque, des experts et des responsables d’institutions de premier plan ont assisté à cette conférence.
Dans son allocution d’ouverture, Rabah Arezki, économiste en chef et vice-président de la Banque chargé de la Gouvernance économique et de la gestion des connaissances, a qualifié la tâche à accomplir de « vaste et difficile ».
Pour sa toute première conférence virtuelle, Tony Blair a mis en avant trois conditions susceptibles d’améliorer considérablement la situation de l’Afrique : investir dans l’industrialisation, accélérer les innovations technologiques et renforcer les capacités des institutions à réaliser des projets. « Il s’agit des principales composantes des priorités « High 5 » de la Banque. Tous ces éléments caractérisent les enjeux auxquels l’Afrique est confrontée et tous sont désormais affectés par une nouvelle dimension d’urgence née de la pandémie de Covid-19 et de ses effets », a-t-il déclaré.
Pour reconstruire en mieux, l’Afrique de l’Ouest, par exemple, pourrait compter sur les importantes ressources de son secteur cotonnier pour développer la production de vêtements et l’industrie textile. L’Afrique est déjà en tête dans le domaine des technologies numériques et cette avance peut encore s’accentuer.
« Partout dans le monde, on peut voir les gouvernements utiliser les technologies avec efficacité […]. Je sais que c’est là une des grandes ambitions de la Banque africaine de développement. C’est essentiel ! », a soutenu Tony Blair.
Il a insisté sur les quatre « P » caractéristiques de la capacité d’un gouvernement à exécuter des programmes : priorisation, politiques, personnel et (gestion des) performances. Concernant la priorisation, Tony Blair a appelé les gouvernements d’Afrique à identifier et à se concentrer sur leurs avantages comparatifs, à porter leurs efforts sur l’exécution, à privilégier les grands projets de transformation et à répondre aux attentes.
« Seule l’Afrique peut faire cela. […] Nous sommes partenaires de ce qui se passe en Afrique […], des progrès accomplis par l’Afrique », a conclu Tony Blair.
Son discours a laissé place à un échange avec le président de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina, pour qui le cycle de conférences apporte des perspectives mondiales et nationales aux problèmes de développement abordés.
« Dans la sphère publique, nous devons constamment repousser les limites du dialogue », a affirmé Akinwumi Adesina. « Rien n’est plus d’actualité aujourd’hui que les difficultés posées par la pandémie de Covid-19. Cette pandémie a bouleversé la croissance économique. »
Rejoignant Tony Blair sur l’importance de la culture d’exécution, le président Adesina a déclaré que l’agriculture offrait à l’Afrique ses meilleures perspectives en matière d’industrialisation : « l’important c’est de savoir comment l’Afrique peut augmenter sa productivité agricole […] et développer des infrastructures intégrées dans les zones rurales concernées […], permettant ainsi la création de nouvelles sources économiques de prospérité à partir de ce dont elle dispose. »
Bien que l’initiative « Technologies pour la transformation de l’agriculture africaine » (TAAT) promue par la Banque ait permis de mettre les technologies agricoles au service de millions d’exploitants agricoles et d’augmenter les rendements de blé, par exemple, elle reste à être déployée à une plus grande échelle. « Nous avons beaucoup de projets pilotes […]. L’enjeu maintenant, c’est la mise à l’échelle », a affirmé Akinwumi Adesina.
Il a cité d’autres interventions clés de la Banque : la Facilité de réponse rapide face au Covid-19 (CRF), dotée de dix milliards de dollars américains, dont l’objectif est de fournir un appui budgétaire aux pays d’Afrique ; l’obligation sociale innovante de trois milliards de dollars, levés sur les marchés de capitaux pour préserver les moyens de subsistance des populations africaines face à la pandémie.
En 2016, Tony Blair a créé le Tony Blair Institute for Global Change, dont la mission est de donner aux dirigeants les moyens de bâtir des sociétés ouvertes, inclusives et prospères dans un monde globalisé et interconnecté.
À la clôture de la conférence, Kevin Urama, directeur principal de l’Institut africain de développement, a déclaré que les priorités étaient désormais bien définies pour que l’Afrique puisse « se reconstruire mieux ». L’ADI a été à l’avant-garde de l’accélération du développement des capacités, de l’assistance technique et de la concertation politique sur le continent, a-t-il souligné.