L’information selon laquelle Zenab Dramé, ministre guinéenne de l’enseignement technique, de la formation professionnelle et de l’emploi, aurait détourné plus de 200 milliards de GNF (plus 20 millions de dollars) fait la une des médias guinéens. Révélée par le site d’informations ‘Guinee News’, ce scandale a depuis été démentie, ni plus ni moins par le premier ministre à travers un communiqué lu à la télévision nationale. Mais cela n’a pas empêché le parquet de Conakry d’ouvrir une enquête.
Dans un article publié sur son site jeudi 26 novembre, le site d’informations ‘Guinee News’, grâce à des sources anonymes qui seraient proches d’une commission restreinte de recensement des biens de certains hauts cadres de l’État, explique comment la ministre Zenab Nabaya Dramé aurait pompé les fonds publics successivement pendant ses fonctions en tant que DAF aux ministères de la Santé, puis de l’Agriculture, et ensuite en tant que ministre de l’Enseignement Technique et de la Formation professionnelle, son poste actuel.
« Suite aux travaux menés par cette commission émanant du cabinet présidentiel, la ministre de l’Enseignement technique, de la Formation professionnelle et de l’Emploi a été épinglée pour non justification de 28 milliards de francs guinéens et plus de 100 milliards de déficit qu’elle a laissé quand elle était directrice administrative et financière (DAF) au ministère de la santé. Sans compter un montant de plus de 56 milliards prétendument au moment où elle était DAF au ministère de l’Agriculture » révèle le site.
« Pour l’organisation des examens nationaux au compte de l’année 2020, le ministère a demandé 27 milliards de francs guinéens. La ministre Zenab a majoré ce montant à 43 milliards de nos francs. Soit une augmentation de 65,38% du montant initial. Pire, sur les 43 milliards GNF débloqués des comptes du trésor public pour l’organisation des examens, elle n’a donné que 15 milliards GNF au chef service des examens et contrôle qui ne suffisaient pour l’organisation des deux semaines d’examens théorique et pratique. Elle a empoché toute seule et ses complices 28 milliards GNF au lieu de les retourner dans les caisses de l’Etat », écrit le site d’informations.
Surfacturation, projets fictifs d’achat d’équipements, de versement de primes, contrats de gré à gré avec conflits d’intérêts, un « vaste réseau de corruption » avec des complicités au ministère du budget, relève l’enquête. Au total, souligne en substance le média, la commission chargée d’évaluer le patrimoine des ministres en fonction a découvert que plus de 200 milliards GNF se sont volatilisés des comptes du trésor public sans justificatifs en remontant, selon le site, les postes précédents de DAF, occupés par la ministre incriminée.
Cependant, le plus surprenant dans cette énième et rocambolesque affaire de détournement, pendant que la ministre incriminée clamait son innocence sur les réseaux sociaux, le gouvernement n’a pas réclamé l’ouverture d’une enquête ou poussé à la démission la ministre incriminée. Mieux, le premier ministre, lui, a apporté publiquement son soutien et va jusqu’à prendre sa défense. Dans un communiqué lu à la télévision nationale, le chef du gouvernement Kassory Fofana a, de manière catégorique, qualifié cette révélation d’information à sensation, rejetant l’existence d’une commission ad’hoc chargé de la lutte contre la corruption et démentant formellement l’existence d’un scandale concernant un membre de son gouvernement, y voyant tout simplement des allégations sans fondement visant à ternir l’image du gouvernement. Il a menacé de saisir la haute autorité de la communication ou la justice pour diffamation. Balayant du coup toute éventualité d’autosaisie pour la justice qui, en temps normal, devrait ouvrir une enquête pour creuser le dossier afin de vérifier la véracité des allégations.
Seulement voilà, la confiance affichée par le premier ministre vis-à-vis de sa ministre n’a tout de même pas empêché l’annonce ce vendredi 28 novembre par le parquet de Conakry de l’ouverture d’une enquête pour « des investigations plus approfondies au terme desquelles, des poursuites pourraient éventuellement être engagées…. » Le parquet rappelant que de telles poursuites seraient initiées soit pour détournement de denier public, soit pour dénonciation calomnieuse et diffamation.
Simple diversion pour étouffer le scandale ou volonté réelle de stopper ces crimes économiques répétitifs ? C’est le wait and see.