La destitution de Donald Trump à travers le 25e amendement de la constitution des États-Unis était en débat ce mardi 12 janvier au Sénat américain. Mike Pence a finalement décidé de privilégier » l’intérêt de la nation américaine » afin d’éviter de créer un antécédent lié à la « jurisprudence », selon la réponse qu’il a adressée à Nancy Pelosi, la chef de file des démocrates à la chambre des représentants.
À moins d’une semaine de la fin du mandat de Trump et de l’investiture de Joe Biden, Nancy Pelosi, la coriace chef de file des démocrates à la chambre des représentants, ne s’est pas une nouvelle fois faite prier pour saisir la balle au rebond après le refus de Mike Pence d’invoquer le 25e amendement pour introduire une nouvelle motion d’impeachment. À l’issue du vote à la chambre basse, Nancy Pelosia a pu rassembler les voix nécessaires à l’ouverture d’une nouvelle procédure « d’impeachment » de Donald Trump, grâce au soutien de dix élus républicains qui ont permis de rassembler 232 voix en faveur de la destitution, contre 197 voix. Cette nouvelle procédure de mise en accusation de Donald Trump est un signal fort qui scelle définitivement les espoirs de retour du Trumpisme dans quatre ans, une idéologie violente, clivante et mortifère.
Même si le timing ne s’y prête pas suffisamment pour la tenue d’un procès comme l’a précisé Micth McConnel, chef de la majorité républicaine au Sénat, et qu’il faudra le ralliement de deux tiers des senteurs pour prononcer la destitution du président, notamment d’au moins 67 élus républicains pour destituer le président, et qu’il faudra attendre après le 20 janvier pour la tenue d’un procès, Nancy Pelosi qui le savait pertinemment, a voulu jouer la carte de la disgrâce politique définitive de Donald Trump avant la fin de son mandat. Elle a une nouvelle fois renvoyé Donald Trump dans les placards de l’histoire et « achever » définitivement la carrière politique du milliardaire.
Mike Pence privilégie « l’intérêt de la Nation »
Au bout du compte, la destitution de Donald Trump n’aurait pas été une si mauvaise affaire pour le Parti Républicain. En réalité, Mike Pence qui avait la possibilité de le destituer en invoquant le 25e amendement de la constitution des États-Unis pour « incapacité » avait toutes les cartes de l’avenir politique du parti républicain en main et avait tout à y gagner sur le plan personnel. Il avait le choix de continuer à prendre ses distances avec Donald Trump tout en restant passif pour éviter de frustrer la base populaire du président sortant qui sera sans doute déterminante lors des prochaines échéances électorales.
La deuxième option qui s’offrait à lui, c’était de congédier Donald Trump et de libérer la droite américaine de son emprise populiste par un leader qui surfe sur les vagues des groupuscules d’extrême droite à l’image de QAnon ou du groupuscule armé Oath Keepers qui s’est particulièrement illustré lors de l’assaut sur le Capitole. En reprenant le leadership pour ramener la droite américaine à ses fondamentaux et éventuellement d’en tirer profit politiquement dans quatre ans lors de la présidentielle de 2024.
Finalement, en s’abstenant d’invoquer le 25e amendement, Mike Pence a préféré jouer la carte de « l’apaisement » compte tenu du contexte de division au sein de la société américaine, selon son approche. Si l’acte du vice-président américain est considéré quelque part comme salutaire dans le souci de favoriser la décrispation politique et une alternance apaisée, il faut surtout relever que politiquement il a manqué une occasion inespérée d’affirmer son leadership en reprenant les devants pour ramener le parti républicain à ses bases traditionnelles. Car rien ne résiste au Trumpisme, même pas le modèle démocratique américain, encore moins le parti républicain, totalement fracturé.
En agissant ainsi, Mike Pence rate une grosse opportunité politique qui l’aurait permis de se positionner et de s’affirmer éventuellement comme une alternative crédible pour des républicains, divisés, fragilisés, en perte de repères et coincés depuis quatre ans dans un populisme électoraliste dangereux, promu par un président qui entretient la défiance vis-à-vis des institutions américaines et dont l’aboutissement et le point d’orgue sont les événements du capitole.
Il faut dire qu’une destitution du président Trump aurait sonné comme une délivrance pour les républicains afin de se libérer de l’emprise du milliardaire. En témoignent les propos du leader de l’ancienne majorité républicaine au Sénat, l’influent et stratège Mitch McConnel qui a clairement indiqué que la destitution du président sortant faciliterait au parti républicain pour « s’en débarrasser » une bonne fois pour toutes. Donald Trump qui est arrivé au pouvoir en 2016 après la défaite surprise d’Hillary Clinton avec son séduisant slogan de » Make America Great again « ‘ n’a au contraire pas réussi à redonner à l’Amérique toute sa Grandeur. En dépit de ses quelques succès économiques, il repart en ayant fragilisé le modèle démocratique américain, exhibé ses failles tout en malmenant le leadership des Etats-Unis à travers le monde.
Donald Trump est rentré définitivement par la petite porte de l’histoire comme étant le seul président dans l’histoire politique des États-Unis à être soumis par deux fois à une procédure « d’impeachment » au cours de son mandat. Échappant à la première, à travers un acquittement grâce à la majorité de son parti au Sénat qui a fait bloc autour de lui. La seconde procédure d’impeachment engagée par les démocrates, à cause de l’attaque meurtrière sans précédent du capitole dont il est considéré comme l’instigateur, et qui vient d’être entamée avec un procès éventuel prévu après l’investiture de Joe Biden sera l’ultime humiliation pour Trump et lui assurera une mort politique certaine.
Malgré avoir pris ses distances avec Trump, Mike Pence qui voulait temporiser la disgrâce définitive de Trump en lui accordant un sursis n’aura finalement pas empêché la démocrate Nancy Pelosi grâce au soutien des démocrates et une dizaine de républicains de sanctionner le président sortant.
L’assaut meurtrier du capitole par des partisans de Trump aura fini par parachever la disgrâce d’un président sortant, isolé, abandonné de toutes parts par son propre camp même par ses plus proches fidèles à l’image de son vice-président Mike Pence ou par ceux qui le protégeaient pour la cause du parti républicain malgré leurs divergences, à l’image du chef de file de la désormais ex-majorité républicaine au Sénat, l’influent Mitch McConnel.