Deux multinationales française et italo-suisse, en l’occurrence Boluda et Terminal Investment Limuted (TIL), demandent au Port Autonome de Douala (PAD) de respecter les clauses contractuelles liées aux activités de remorquage et d’exploitation du terminal à conteneurs.
Le Port autonome de Douala souffle sur la braise. Non seulement de son double échec devant les tribunaux camerounais et français face au consortium Bolloré-AMPT au sujet de l’exploitation du terminal à conteneurs du port de Douala, mais davantage à cause des pressions diverses qui lui viennent de ses partenaires pour non-respect des engagements contractuels.
Les entreprises Boluda et TIL veulent assurer respectivement les activités de remorquage et celles de la gestion du terminal car adjugées provisoirement selon les cas, ce qui n’entre plus dans les options du PAD qui a créé des régies déléguées et reprendre à son compte, lesdites activités.
Dans une correspondance au directeur général du PAD, Cyrus Ngo’o, que Financial Afrik a pu consulter, le directeur général de Terminal Investment Limuted (TIL), Ammar Kannan, pose le problème en ces termes. « Selon votre courrier du 13 février 2020 et notre courrier du 10 février 2020, la validité de notre offre a été repoussée au 30 août 2020. Puis suite à un courrier du 19 août 2020, nous avons poussé la validité de notre offre au 31 décembre 2020. Le processus d’attribution reste tributaire de la décision de la Cour suprême non rendue à ce jour sur le pouvoir du Port Autonome de Douala suite au jugement n°410/GD/19 du 26 décembre 2019. A cet effet, et au vu des deux points ci-dessus et des échanges de courriers cités, nous prolongeons la validité de notre offre déposée le 30 août 2019 au 31 décembre 2021. Nous maintenons notre confiance dans ce dossier et nous restons à votre écoute sur les développements judiciaires de ce dossier et des procédures engagées », précise-t-il.
A en croire Ammar Kannan, une solution à l’amiable reste possible: «cette situation qui perdure n’est pas sans porter un préjudice financier à notre groupe et bloque l’opportunité pour le Cameroun de développer un grand projet structurant et de modernisation nécessaires à son économie». Aussi, pour accélérer le processus de concession, « monsieur El-Bez David, en charge de ce dossier, viendra vous rencontrer à Douala courant janvier afin de faire un point sur ce dossier. Nous souhaitons ainsi rendre visite à toutes les autorités concernées de loin ou de près par ce dossier afin de rappeler notre souhait de signer la convention de concession dans les plus brefs délais et de commencer à opérer le terminal de Douala selon les termes fixés ».
Un rappel pour le respect des clauses contractuelles qui intervient pratiquement au même moment que celui de la firme française Boluda.Le 22 décembre 2020, le PAD a créé une Régie en charge du remorquage en vue d’assurer la continuité du service de remorquage dès le 1er janvier 2021. Ce qui, en d’autres termes, met fin «de manière unilatérale» aux activités de la société Boluda, adjudicataire provisoire de l’Appel International à Manifestation d’Intérêt (AIMI) du 14 septembre 2018, pour la concession de l’activité de remorquage au Port de Douala Bonabéri.
Pour ce qui est du Terminal à conteneurs (TAC), après l’éviction de Douala International Terminal (DIT), filiale du consortium franco-danois Bolloré-APMT qui en assurait l’exploitation de 2004 à 2019 et en dépit des décisions des tribunaux camerounais et français toutes favorables à Bolloré, le PAD a décidé de créer sa propre Régie du terminal à conteneurs (RTC). Cette concession d’une durée initiale d’un an qui aurait pu arriver à son terme le 1er janvier 2021, a été prorogée de trois ans par le PAD, c’est-à-dire, jusqu’en 2024.
D’où le courroux de TIL qui pense avoir été roulé dans la farine par le PAD. En effet, cette multinationale italo-suisse avait été déclarée le 16 septembre 2019, adjudicataire provisoire de la concession des activités de rénovation, de modernisation, d’exploitation et de maintenance du Terminal à conteneurs du Port de Douala, avant une décision du chef de l’Etat camerounais Paul Biya, prise le 23 octobre 2019 et portant suspension de la procédure de passation de la concession du terminal à conteneurs du Port de Douala-Bonaberi et-ce, « en attendant les conclusions définitives de l’affaire Société AMP Terminals BV et Bolloré S.A contre Port Autonome de Douala portant sur la requête du Tribunal administratif du Littoral à Douala aux fins de sursis à l’exécution de la Décision N° 0006219DG/PAD du 08 janvier 2019 ».
Les contours de cette affaire remontent au mois de janvier 2018, lorsque le PAD a lancé l’Appel international à manifestation d’intérêt (APMI), où cinq entreprises avaient été retenues sur une short-list, sans le groupe Bolloré écarté de la sélection. Il s’agit de CMA Terminals, basé à Marseille en France ; la société émiratie Dubaï Port World ; le consortium Hutchison Port Investments Ltd, immatriculé aux Iles Caïmans ; la firme de droits Saoudiens Red Sea Gateway Terminal et la firme italo-suisse Terminal Investment Ltd, basée à Genève, en Suisse. Depuis lors, des rebondissements se succèdent sans entrevoir le bout du tunnel. L’absence d’un consensus entre le PAD et ses partenaires pourrait entrainer d’autres procédures judiciaires.