La tension était forte, dimanche 24 janvier 2021, le long du tronçon routier stratégique séparant le Maroc de la Mauritanie et, au delà, du Sénégal et de l’Afrique de l’Ouest. Les indépendantistes du Front Polisario ont bombardé samedi soir le poste frontalier de Guerguerat sous contrôle marocain dans le territoire disputé du Sahara occidental.
Cette opération militaire sporadique et de faible intensité (4 missiles ont été larguées selon le Polisario) n’en constitue pas moins une première depuis le cessez le feu de 1991 signé sous l’égide de l’ONU qui y est présente militairement à travers la Minurso. Le raid intervient quelques semaines après la reconnaissance de le la marocanité du territoire disputé du Sahara par le département d’Etat américain et l’ouverture de plusieurs consulats à Dakhla, ville emblématique, avec Laayoune, des provinces sahariennes, par des pays d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Occident.
En se risquant à une opération militaire, le Polisario tente de secouer le statu quo, en compensant ses revers diplomatiques par un succès militaire peu évident au vu de la réalité du terrain même si, souffle un observateur, les indépendantistes sont appuyés en arrière plan par une armée algérienne qui a désormais le droit d’intervenir en dehors de son territoire selon la nouvelle constitution issue du référendum du 1er novembre 2020. «La guerre va continuer et aller vers l’escalade. Toutes les positions de l’armée marocaine sont des cibles», a déclaré à l’AFP Sidi Ould Oukal, un haut responsable de la Sécurité et porte-parole du ministère de la Défense de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), proclamée en 1976 et reconnu par l’Union Africaine (en 1984) mais pas par la Ligue Arabe et l’ONU.
A la mi-octobre, des groupuscules se réclamant du Polisario avaient tenté de bloquer le trafic des marchandises, principalement agricoles, entre le Maroc et la Mauritanie, principal voie de passage vers l’Afrique de l’Ouest. Trois semaines plus tard, le 13 novembre, un escadron des Forces armées royales (FAR) intervenait pour sécuriser ledit tronçon. L’opération de ce dimanche se veut aux yeux des séparatistes comme un « acte de légitime défense. Côté marocain, l’on reconnaît, selon un haut responsable joint par l’AFP à Rabat, qu’«il y a eu des tirs de harcèlement à proximité de la zone de Guerguerat, mais cela n’a pas touché l’axe routier, le trafic n’a pas été perturbé». «Ça s’inscrit dans un cycle de harcèlement depuis plus de trois mois» et «cela dure depuis un certain temps, il y a une volonté de créer une guerre de propagande, une guerre de médias, sur l’existence d’une guerre au Sahara», mais «la situation est normale», a-t-il assuré.