Le temps n’est plus aux escarmouches. Les deux belligérants ont décidé d’en découdre, chacun usant de l’artillerie lourde pour vaincre l’allié devenu adversaire encombrant, puis ennemi juré. Une guerre totale entre le Cap pour le changement (CACH) de Félix Tshisekedi et le Front commun pour le Congo (FCC) de l’ex-chef de l’Etat Joseph Kabila.
L’accumulation des désaccords entre ces poids lourds de la scène politique en République démocratique du Congo (RDC) traduit le caractère irréconciliable des deux camps, où chacun fait usage des armes conventionnelles et non conventionnelles pour venir à bout de son ennemi.
La motion de censure aux allures d’un plébiscite pour le camp présidentiel avec 367 suffrages sur 377 votants a scellé le renversement du gouvernement dirigé par le premier ministre Sylvestre Ilunga mettant fin à une idylle qui aura tenu à peine deux ans. Après le renversement de l’assemblée nationale en décembre, le président de la République a officiellement signé le 6 décembre 2020, la fin du pacte qui liait les deux formations depuis son élection en 2018 qui imposait un exercice équilibriste du pouvoir. Dans sa quête de s’affranchir du joug de son désormais ex-allié, le chef de l’Etat a nommé un « informateur » ayant pour mission d’identifier une nouvelle majorité parlementaire.
Poussé dans ses derniers retranchements, l’ancien chef de l’Etat n’est pour autant pas resté un spectateur passif, multipliant des réunions et des stratégies avec ses partisans dans l’optique de maintenir l’hégémonie de son camp. Ceci eut pour effet d’enliser la crise et de radicaliser les positions. La destitution du gouvernement par la majorité des députés le 27 janvier 2021 apparaît comme un dernier acte fort du président Tshisekedi dans sa volonté de s’affranchir définitivement d’une encombrante alliance pour se donner une nouvelle majorité qui lui conférerait la plénitude du pouvoir.
Par cet acte, le camp présidentiel qui accuse notamment le gouvernement « d’incompétent » et de « n’avoir pas tenu ses promesses », entend prendre en main tous les leviers du pouvoir. L’enjeu étant de terminer le mandat en beauté, ce qui permettrait au CACH de se positionner comme favori lors de la prochaine élection présidentielle qui pointe à l’horizon. Evidemment, le gouvernement sortant conteste son impeachment estimant qu’ « il y a lieu de relativiser la responsabilité du gouvernement dans le prétendu échec allégué par certains honorables députés ». En d’autres termes, non seulement la responsabilité serait partagée entre les deux pôles de l’exécutif, mais, il y voit davantage une responsabilité prépondérante du chef de l’Etat.
Félix Tshisekedi qui aurait accepté de « donner les mains » à son prédécesseur pour se faire élire ne supporterait plus d’être ce général sans troupe et d’être à la merci d’un allié qui semble finalement lui pourrir la vie dans l’optique de précipiter sa chute. Sauf rebondissements spectaculaires, la double destitution du parlement et du gouvernement confère un avantage au camp présidentiel que ce dernier cherchera certainement à consolider pour éviter un renversement de la situation qui lui serait fatal.
Les prochains jours s’annoncent houleux et permettront de voir plus clairs, tant la réaction du camp Kabila est attendue. De quoi être inquiet de ce psychodrame qui se joue du coté de Kinshasa, d’autant qu’il impacte négativement sur les Congolais.