Le président togolais Faure Gnassingbé s’est déplacé le 8 février 2021 sur la base d’opérations de Koundjoare dans le grand nord du pays pour, selon ses services, féliciter et encourager les éléments des Forces armées en poste dans cette zone dite sensible. Ce déplacement fait suite à plusieurs annonces faites dans le cadre de la défense, depuis la nomination d’une titulaire au très stratégique portefeuille de tutelle et l’adoption d’un programme militaire quinquennal, jusqu’à la réorganisation de l’armée.
Jeudi 1er octobre 2020. Faure Gnassingbé surprend l’opinion en annonçant une ministre des Armées. Il s’agit de Marguerite Essossimna Gnakadé qui prend en charge un portefeuille rattaché à la présidence depuis 2009, suite à l’arrestation de l’ancien ministre de la Défense et demi-frère du président, Kpatcha Gnassingbé, jugé et condamné à 20 ans de prison pour tentative de coup d’Etat.
La désignation de cette banquière aux Armées – elle avait été directrice générale de la Banque togolaise pour le commerce et l’industrie totalement contrôlée par l’Etat – a sonné le glas d’un profond remaniement au sein de la grande muette. Le 4 octobre, le président togolais procède à des nominations aux postes de chef d’état-major particulier, de chef d’état-major de l’armée de terre, et de chef d’état-major de l’armée de l’air. En décembre, Faure Gnassingbé annonce son beau-frère Dadja Maganawé (l’époux à sa sœur) au poste de chef d’État-major, en succession de Félix Kadanga en fonction depuis 2013.
C’est en effet un secret de polichinelle. Les autorités togolaises craignent une attaque de groupes djihadistes venant du Burkina Faso voisin, et ne lésinent plus sur les moyens. Elles viennent d’adopter, à ce titre, une loi de programmation militaire (2021-2025) dotée d’un budget de 722 milliards de F CFA (environ 1,4 milliards USD) pour le renforcement des équipements des Forces armées togolaises (FAT). Il est prévu, entre autres, une augmentation des effectifs des troupes d’environ 25%, la mise en place d’une nouvelle Unité des forces spéciales (UFS), d’un Groupe d’intervention léger antiterroriste (GILAT), et l’achat de nouveau équipements (chars, véhicules blindés, hélicoptères, patrouilleur en haute mer, …).
« Faire pour que ces terroristes ne mettent pas les pieds ici »
Par ailleurs, au titre de l’année 2021, le gouvernement a prévu une allocation budgétaire de 82,5 milliards de F CFA (environ 153 millions USD) pour doter les forces de défense et de sécurité de moyens nécessaires pour « poursuivre les actions d’urgences sécuritaires, en vue de renforcer la lutte contre l’insécurité et le terrorisme transfrontalier », selon le ministre Sani Yaya des Finances. Ce montant représente 10,6% du total des crédits alloués aux ministères et institutions au titre de l’année.
« Nous avons décidé de tout faire pour consacrer un budget conséquent à vos unités et à notre armée », a déclaré Faure Gnassingbé le 8 février 2021 aux militaires en poste à Koundjoare, une localité située près de la frontière avec le Burkina Faso. « Nous amènerons une mission urgente pour que des actions urgentes y soient identifiées, des décisions soient prises. Des pistes seront améliorées, et si c’est possible l’électricité aussi verra le jour. (…) Il faut tout faire pour que ces terroristes ne mettent pas les pieds ici. Faisons tout pendant qu’il est encore temps pour nous armer, pour nous défendre, et pour protéger notre souveraineté, l’intégrité nationale, nos populations et nos biens », a-t-il ajouté.
Trois attaques en deux semaines
Par ailleurs, reconnait-il, « la lutte contre le terrorisme n’est pas seulement une affaire militaire ». « Il y a aussi la lutte contre la pauvreté, et ça, c’est l’affaire du gouvernement », a déclaré celui que la presse annonce à l’Elysée dans les prochaines semaines – son ministre des Affaires étrangères venait de rencontrer Jean-Yves Le Drian à Paris.
Mais attendant de défendre son territoire, l’armée devra faire face aux attaques sur les différents fronts où elle s’est engagée dans la sous-région ouest-africaine. Ce mercredi 10 février, le contingent togolais de la Minusma stationné à Kéréna au Mali a subi une attaque kamikaze dans la matinée. « Cette action d’envergure visait en premier lieu la cuve à carburant et a été suivie de tirs nourris pendant près d’une heure. Grâce à la vigilante réaction des soldats togolais, l’attaque a été repoussée. Le bilan est d’une vingtaine de blessés dont neuf graves pris en charge par les services compétents », informent les autorités togolaises.
C’est la troisième attaque du genre en l’espace de deux semaines. Le 28 janvier 2021, le véhicule d’une relève a sauté sur un engin explosif à Talas occasionnant 4 blessés dont 1 grave. Le lendemain, un obus a été tiré sur le poste de commandement togolais à Douentza et a raté sa cible, selon les sources officielles.