En visite de travail à Paris le 12 février, Ismail Omar Guelleh a invité Emmanuel Macron à muscler la présence française dans son pays au moment où Paris recule dans cet Etat-confetti, centre stratégique de plusieurs puissances ayant décidé d’y déployer une base militaire. Alors que les deux Etats doivent renégocier, d’ici quelques semaines, les accords de défense les liant depuis 1977 après un réaménagement en 2011, le chef de l’Etat djiboutien a pointé les trop faibles investissements de l’ancienne puissance coloniale. Les chiffres ne le démentent pas.
De 2015 à 2019 le volume d’échange a reculé de 4% passant de 87 millions € à 73 millions €. Les exportations vers Djibouti sont passées de 86,5 millions € à 72,3 millions € sur la même période pour des importations stabilisées à 1,5 million. Djibouti est seulement le 133 ème partenaire commercial de la France alors que sa croissance moyenne se monte à 7,5% de 2015 à 2019. Cette tendance est à rebours de celles d’autres Etats ayant décidé de miser sur l’emplacement géographique de l’ancien territoire des Afars et des Issas. Depuis plusieurs années, Paris se trouve laminé par l’arrivée tonitruante de pays concurrents, la Chine en tête. En 2017, Pékin a inauguré sa gigantesque première base militaire. Forte de 10.000 hommes cette enceinte permet de servir ses intérêts dans la zone. A l’instar des Etats- Unis, du Japon ou encore de l’Espagne, autres pays possédant des forces projetables, la situation de Djibouti permet le contrôle du détroit de Bab-el- Mandeb, où transite la majeure partie du commerce mondial. Pékin a également fait de cet Etat un point d’ancrage stratégique pour son projet Road & Belt Initiative de nouvelles routes de la soie.
Cette emprise progressive n’a pas que des avantages. Si les Djiboutiens se sont réjouis, dans un premier temps, du déversement de financements et d’investissements chinois dans le pays, ce sentiment d’euphorie s’est aujourd’hui inversé. Djibouti se trouve, en effet, asphyxié par la dette chinoise, qui représente plus de 70% de son PIB. Entre 2012 et 2018, la Chine a investi 14 milliards $. A défaut de pouvoir offrir une concurrence, Paris, qui entretient 1400 soldats sur place, entend se poser en avocat des pays africains endettés. Cette nouvelle thématique donnera lieu à l’organisation, au printemps prochain, d’un vaste conférence internationale sur les nouvelles formes de financements des économies africaines.