[Article premium offert] Quelques heures après l’annonce de la disparition d’Idriss Deby à 68 ans, un Conseil militaire de transition (CMT) a installé une phase de transition au Tchad. Arrivé au pouvoir en renversant Hissène Habré, fin 1990, le président sortant, officiellement réélu le jour de son décès pour un sixième mandat avec près de 80% des voix, a été tué dans les combats opposant l’armée nationale aux rebelles du Front pour l’alternance et la concorde du Tchad (FACT).
Ce mouvement fondé en 2016 est dirigé par Mahamat Mahadi Ali. Réfugié politique depuis 1989 en France, où il a suivi des études de droit et de sciences politique, ce dernier est un Gorane, ethnie de l’ex-président Habré. Opposant à Idriss Déby Itno, il se préparait depuis plusieurs années à renverser le pouvoir depuis la Libye à la tête de quelques 1500 hommes.
D’une durée de 18 mois, la transition est dirigée par le général de corps d’armée Mahamat Idriss Deby, l’un des fils du défunt chef de l’Etat. Selon un communiqué du CMT, ce nouvel exécutif garantit le respect des traités et accords internationaux ainsi que l’intégrité nationale. L’Assemblée nationale et le gouvernement ont été dissous. Un deuil de 14 jours a été décrété et les frontières ont été fermées jusqu’à nouvel ordre.
Alors que cette transition doit théoriquement déboucher sur de nouvelles élections inclusives après la nomination d’un gouvernement de transition, ce scénario est fermement battu en brèche par les oppositions politiques et armées, qui contestent la légitimité du CMT et son caractère monarchique. Les conditions de la succession d’Idriss Deby Itno pourraient ainsi convaincre le FACT de poursuivre son offensive et de continuer sa descente sur N’Djaména dans les prochains jours après un repli stratégique dans sa zone du Kanem-Bornou, au nord du pays.
A côté du FACT, l’UFR (l’Union des Forces de la Résistance), autre mouvement rebelle, emmené par Timan Erdimi, pourrait parallèlement se réactiver après avoir été tenu en échec par les forces françaises de Barkhane lors d’une précédente offensive, du 3 au 6 février 2019. Même son de cloche du côté de l’opposition parlementaire. Ses principaux représentants tels l’opposant historique Saleh Kebzabo de l’Union nationale pour le développement et le renouveau (UNDR) et Mahamat Ahmat Alhabo du Parti pour les libertés et le développement (PLD) de feu-Mahamat Ibni Oumar Saleh, ont déjà vertement critiqué le caractère anticonstitutionnel du CMT.
Les articles 81 et 82 de la Constitution du 4 mai 2018 expliquent en effet que la vacance définitive du pouvoir présidentiel doit être dument «constatée par la Cour Suprême saisie par le gouvernement et statuant à la majorité absolue de ses membres». En outre, la transition doit être assurée par le président de l’Assemblée nationale ou, à défaut, par son premier vice-président. « Dans tous les cas, il est procédé à de nouvelles élections présidentielles dans les 45 jours au moins et 90 jours au plus après l’ouverture de la vacance », précise encore le texte.