Une délégation du Conseil militaire de transition (CMT) conduite par son président a séjourné le 10 mai 2021 au Niger, où elle a eu une série de rencontres avec les autorités de ce pays. Une visite dont le point culminant a été la rencontre entre Mahamat Idriss Déby Itno et le chef de l’Etat nigérien Mohamed Bazoum, par ailleurs médiateur au nom du G5 Sahel dans la crise tchadienne.
Si l’entretien entre les deux dirigeants a porté notamment sur « la coopération bilatérale et la situation sécuritaire dans la sous-région », les principaux points abordés ont surtout concerné l’appui des autorités nigériennes pour aider à capturer les rebelles du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT) dont plusieurs responsables ont fui vers le Niger pour éviter d’être « anéantis » ou capturés par l’armée tchadienne. C’est ce qui explique notamment le déplacement des responsables du CMT dans la localité de Téra dans la zone dite des trois frontières, Burkina Faso, Mali et Niger, où un contingent de 1200 soldats tchadiens a été déployé pour lutter contre les terroristes de l’Etat islamique dans le Sahel.
Selon des sources sécuritaires, le Tchad qui avait l’intention de réduire le nombre de ses soldats déployés dans le cadre de l’opération Barkhane s’est ravisé. Une décision où le président français Emmanuel Macron aurait pesé de tout son poids. Au sujet de la rébellion, les nouvelles autorités tchadiennes ont reçu les assurances des leurs homologues nigériennes de fédérer leurs efforts pour traquer « jusqu’au dernier rebelle du FACT ». C’est d’ailleurs grâce à cette coopération que 150 rebelles fait prisonniers au Niger ont été ramenés à Ndjamena.
Un succès militaire qui a amené le chef d’état-major des armées le général Abakar Abdelkerim Daoud a annoncé la déroute de la rébellion. « Nous avons pu maitriser la situation. Nous avons amené des prisonniers et des matériels. Au terrain il ne reste rien. Tout est dans l’ordre maintenant. Il y a rien à craindre », a-t-il indiqué. Parmi les prisonniers, « il y a ceux qui sont venus de la Lybie, du Niger et du Soudan. Nous avons également des mineurs qui ont été arrêtés ».
Hormis le volet sécuritaire, la présence des dirigeants du CMT au Niger avait également un important volet diplomatique, au moment où est prévue ce mardi à Addis-Abeba, en Ethiopie, l’ouverture de la réunion du Conseil paix et sécurité de l’Union africaine qui doit décider de sanctionner ou de ne pas sanctionner le Tchad suite à la prise de pouvoir non conforme aux mécanismes constitutionnels par le CMT.
Selon de fiables informations, plusieurs dirigeants du continent notamment ceux de la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC) seraient plutôt favorables pour une transition de dix-huit mois tel que l’a annoncé la junte, ce qui dispensera le Tchad des sanctions internationales au regard de « la situation exceptionnelle » qui a favorisé l’arrivée des militaires au pouvoir suite au décès tragique du président Idriss Déby Itno.
Ce qui laisse présager que la réunion du Conseil paix et sécurité de l’UA sera houleuse, tant deux camps se dégagent nettement sur le dossier tchadien. Les premiers préconisent une « indulgence » pour le CMT jusqu’à la fin de la période transitoire, nonobstant le caractère anticonstitutionnel de la prise du pouvoir par les militaires ; ce qui serait contraire aux principes de l’Union africaine et ferait cas d’exception. Les seconds sont pour l’application stricto sensu de la réglementation en vigueur pour éviter « un cas d’école » dont pourraient s’inspirer des putschistes.