L’actualité politique au Tchad présage des rebondissements dans les prochains mois, dont l’un des conséquences pourrait entraîner la prorogation des militaires au pouvoir. Arrivé à la tête du pays en mars 2021 suite au décès tragique du président tchadien Idriss Déby Itno, le Conseil militaire de transition (CMT) adoubé pour une transition de dix-huit mois, est soupçonné d’orchestrer des manœuvres visant à poursuivre son bail au-delà du délai imparti. La décision du président Mahamat Idriss Déby publiée le 13 août 2021 mettant en place « le comité technique spécial relatif à la préparation de la participation des politico-militaires au dialogue national inclusif » semble accréditer cette thèse.
Pour nombre d’observateurs, « le fait de ne pas limiter ce comité dans le temps indique clairement la volonté des militaires de prolonger la transition, en prenant pour argument que le travail attendu ne saurait être bâclé parce qu’on doit rester stricto sensu sur une transition de dix-huit mois ». En d’autres termes, entre la fin dialogue national inclusif et l’organisation des élections, l’on s’achemine sur « un glissement » dont il est difficile de situer la durée exacte. La société civile à l’instar du mouvement Wakit Tama n’exclut pas d’organiser des manifestations de protestation à travers le pays pour amener le CMT à limiter ce dialogue dans le temps et à publier dans les délais requis, un calendrier politique clair et précis.
Un discours partagé également par certains partis d’opposition, malgré la nomination de Saleh Kebzabo, le leader de l’Union nationale pour la démocratie et le renouveau (UNDR) et figure de proue de l’opposition à la vice-présidence dudit comité. Il est à craindre que cette situation sociopolitique tendue au Tchad ne conduise le pays dans l’impasse d’autant que des mouvements rebelles à l’exemple du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT) qui ne participeront pas audit dialogue ne se priveraient pas de mettre la pression sur le pouvoir en multipliant des attaques armées.
Autre élément qui laisse croire que le dialogue inclusif s’annonce houleux, c’est « le clair-obscur » entretenu par le CMT sur sa volonté de rester au pouvoir. Que ce soit à Ndjamena, la capitale que dans certaines chancelleries, il se susurre que les autorités de transition feraient feu de tout bois pour présenter une candidature lors de la prochaine élection présidentielle. Des soutiens recherchés notamment auprès des pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) dont on espère que le sommet des chefs d’Etat prévu le 18 août prochain ouvrira un œil attentif sur la situation au Tchad. Toujours dans le même sillage, un lobbying est mené vers des puissances occidentales au rang desquelles la France dont l’entourage du président Emmanuel Macron serait en voie d’adouber le CMT. Par ailleurs, dans les rangs du parti présidentiel, le Mouvement patriotique du salut (MPS), des tractations sont en cours pour « imposer » le moment venu le président du CMT comme candidat du parti à l’élection présidentielle.
Pourtant, dans la lettre et l’esprit de la transition militaire de dix-huit mois, les membres du CMT et tout autre militaire sont exclus de briguer la magistrature suprême. Au regard des batailles ouvertes, larvées ou latentes, il serait imprudent en l’état actuel de déterminer ce qui se passera au terme des dix-huit de transition militaire.
Tchad : vers une prolongation de la transition militaire ?
Achille Mbog Pibasso
Achille Mbog Pibasso, Directeur de rédaction de Financial Afrik, est diplômé en journalisme et en communication d’entreprise. Particulièrement intéressé par l’économie et la finance, c’est également un féru des sujets politiques. Son expérience d’agencier lui permet de traiter de tous les sujets d’actualité.
Lectures recommandées
Ajouter un commentaire