Rapprocher l’Afrique de la Scandinavie.
Par Michel LOBE EWANE
Madeleine Taylor vient d’être cooptée pour entrer dans le Conseil d’administration d’une importante institution financière danoise, la Nordic Global Investment Foundation (NGIF). Une promotion de plus pour celle qui, en juillet dernier, a été nommée Directrice Stratégique pour le développement des projets et des investissements de cette institution. Dans sa lettre de mission, l’ancienne conseillère spéciale du Gouvernement et représentante spéciale de la République de Guinée Bissau en Scandinavie (de 2019 à 2020) aura la responsabilité de représenter la Nordic Global Investment Foundation (NGIF) sur le continent. Son Focus, le financement de projets d’infrastructure dans le domaine social et humanitaire répondant aux Objectifs de Développement Durable (ODD) fixés par les Nations Unies.
Titulaire d’une licence en journalisme de l’Académie audiovisuelle de Paris, Madeleine Taylor s’est spécialisée en ingénierie des Affaires Internationales à l’Ecole Nationale Supérieure de Paris. La Franco-Bissau guinéenne a obtenu une certification en management de l’innovation et de la transformation digitale à l’International Business Management Institute de Berlin, et une autre en développement des Affaires et leadership au Copenhagen Business School (CBS). Entretien.
Financial Afrik : Vous venez d’être trustée par la Nordic Global Investment Foundation (NGIF). Quelle est la spécificité de cette institution dans son approche en tant qu’investisseur ?
Madeleine Taylor-Mendy : En effet, je viens tout juste de commencer au sein du Nordic Global Investment Foundation (NGIF) comme Directrice Stratégique de Développement des projets d’infrastructures et des financements non remboursables pour le Continent Africain. Cette nomination s’inscrit dans le prolongement de mon parcours dans les pays Nordiques.
C’est un honneur pour moi de pouvoir contribuer à ce nouveau virage de la relation entre l’Afrique et les pays nordiques. Il s’agit d’une approche qui favorise l’équité dans les relations économiques, la participation active de la population locale, la construction d’infrastructures pérennes, une meilleure gouvernance, plus d’intégrité et de transparence dans les affaires. Ma mission et celle de mon équipe dédiée par région consiste à coordonner tous les projets majeurs en Afrique en recherche de financement répondant aux exigences et aux critères du NGI Foundation.
Au sein de NGIF, vous êtes l’une des personnes ayant la responsabilité d’orienter et de canaliser les investissements vers l’Afrique. Dans quel esprit entendez-vous remplir cette mission?
C’est une réelle opportunité pour le développement durable et surtout pour établir un vrai projet de société en Afrique. Mais c’est, également, une invitation pour les porteurs de projets Gouvernementaux et/ou privés et pour les investisseurs de participer la construction d’une Afrique inclusive dont nous avons tous rêvés, qui prend en compte la participation de tous. Cette vision souligne la fin d’une ère de dépendance dans un système où l’Afrique avait tendance à tendre la main pour recevoir des aides et s’enfoncer dans le cycle de la dette. La stratégie de NGI Foundation entend favoriser, sans conditionnalités, le développement de l’Afrique, en la libérant complètement de son fardeau et en réduisant les obligations liées aux dettes cumulées depuis de nombreuses années.
Pouvez-vous être plus explicite lorsque vous parlez de la réduction des obligations liées à la dette ?
En fait à travers un programme de financement exigeant et responsable, Nordic Global Investment Foundation (NGIF) veut contribuer au développement durable en Afrique et miser sur sa principale ressource : le potentiel humain, avec une jeunesse grandissante qui représente entre 60% et 70% de la population et les femmes dans la parité du genre. Dans son engagement, le Nordic Global Investment Foundation offre par projet, 80% d’employabilité locale.
Les programmes de financement de projets qui répondent aux exigences du Nordic Global Investment Foundation font l’objet d’un apport financier, qui n’est pas un prêt et qui est non remboursable. Ce montant doit être soutenu par un apport de 20% d’un «collatéral» qui peut être une banque, une institution financière, un fonds d’investissement ou l’Etat bénéficiaire lui-même. Cette somme n’est pas utilisée mais est restituée à l’issue d’un terme précis. Il s’agit d’une approche qui devrait permettre aux pays africains de sortir du cycle interminable de la dette.
Toute la méthodologie du Nordic Global Investment Foundation et nos outils de travail sont fondés sur les ODD (Objectifs de développement durable). Il s’agit pour nous de déployer des financements qui auront un impact durable sur les populations et les sociétés partenaires que nous rencontrerons, à travers notre métier.
Nordic Global Investment Foundation veut accompagner les Acteurs publics et privés Africains vers un développement économique éthique, équitable et durable.
Vous êtes une spécialiste des relations entre l’Afrique et les pays Scandinaves. Qu’est ce qui d’après vous, fait la particularité de ces pays dans leurs relations économiques avec l’Afrique?
Les Scandinaves, plus pragmatiques, ont une nouvelle approche en Afrique, plus axée sur l’inclusion et l’accompagnement de la population à prendre son destin en main. Ils sont convaincus que la réelle innovation doit être conduite à travers un écosystème dans lequel se retrouvent les aspirations et les moyens locaux fournis. Mon expérience de plus de 15 ans dans les pays Nordiques, m’a permis de tisser des relations solides avec les confédérations des sociétés Danoises, Suédoises, Norvégiennes et avec les fonds d’investissements qui sont prêts à investir en Afrique.
Qu’est ce que ces pays peuvent apporter concrètement à une dynamique de développement du continent ?
La Scandinavie est une petite région du Nord de l’Europe – composée de trois pays : le Danemark, la Norvège et la Suède. Elle a capitalisé sur son unique ressource basée sur la sincérité, le développement personnel et la conscience interculturelle. En se tournant vers la Scandinavie, c’est l’occasion de réellement écrire un avenir qui conduira à un développement plus consistant et généralisé de l’Afrique. Leurs territoires font partie des plus riches au monde grâce à un système démocratique et une économie structurée autour de la collecte des taxes, avec des entreprises à la pointe de la technologie et des fonds souverains parmi les plus riches au monde. En Scandinavie règnent l’éthique, l’anti-corruption, des traditions qui manquent à l’Afrique et empêchent l’épanouissement d’un continent plein de ressources, de matières premières et autres richesses. Je ne me considère pas comme une spécialiste des pays Nordiques. Plus sincèrement, ma réelle conviction est basée sur le rôle de transfert de compétences que doit jouer chaque membre de la diaspora Africaine dans le pays où il a été formé.
Quelle serait d’après vous la meilleure approche à développer par les acteurs économiques africains, que ce soit le secteur privé ou l’Etat, pour tirer le meilleur parti du partenariat avec les investisseurs Scandinaves?
Je vais répondre ce que répondrait le Board du Nordic Global Investment Foundation : “L’avenir appartient aux Africains. Nous devons juste les aider tout en les respectant. Si nous unissons nos forces, nous pouvons le faire ensemble, nous pouvons multiplier nos efforts pour réaliser la vision de vivre une vie meilleure demain. De l’Exécutif des Gouvernements aux opérateurs (EPC) en passant par des Investisseurs privés en Afrique qui aspirent au changement inclusif seront les bienvenus pour étudier nos programmes de financement non-remboursable (grant) pour bâtir l’Afrique.”
Encadré :
Sans attendre, Madeleine Taylor Mendy s’est lancée dans l’action. Le premier pays africain avec lequel elle a commencé les discussions est le Mali. A l’issue d’un entretien avec Modibo Koné, le Ministère de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement Durable, un voyage d’affaires est en préparation pour rencontrer le Président et le Premier Ministre de la République du Mali. Autre dossier qui a avancé, c’est celui avec la République Centrafricaine. A Félix Moloua, ministre d’Etat chargé du Plan, de l’Economie et la Coopération internationale et Hervé Ndoba son collègue des Finances et du Budget, la Directrice stratégique et du développement de NGIF a présenté une solution d’optimisation de collecte de micro-taxes prélevées sur le secteur informel et proposée par la société suédoise Red Flash Mobile AB. Les deux membres du gouvernement centrafricains se sont montrés intéressés.
Au même moment le Président du NGIF se préparait pour un voyage business trip à Nairobi au Kenya où il doit rencontrer des membres du gouvernement kenyan. L’offensive de Madeleine Taylor est désormais lancée.
Un commentaire
C’est un espoir avéré pour l’Afrique et les africains de se mettre à l’école de NGIF pour enclencher le développement social et économique en général et celui des zones frontalières en manque de soutien financier accru.
Merci !