En tant que ministres africains des Finances et de l’Économie, le multilatéralisme est pour nous plus qu’une question abstraite de politique étrangère. Il permet en effet d’assurer la prospérité de millions de nos citoyens. Nos pays ont été et restent confrontés à des pressions économiques, sociales et politiques considérables, dont beaucoup sont des chocs externes. C’est pourquoi, nous comptons sur les institutions multilatérales pour proposer une aide économique aux moyens de subsistance et à la vie collective.
Pourtant, aujourd’hui, le multilatéralisme est remis en question à un moment où on en a le plus besoin. Si les économies avancées ont pu mettre rapidement en place des tampons monétaires et fiscaux pour répondre à la crise de la COVID-19, en mobilisant plus de 26 % de leur PIB pour lutter contre une récession imminente, les pays africains quant à eux ont mobilisé moins de 1 % de leur PIB pour répondre à cette crise. La crise de la COVID-19 a été un test pour le système multilatéral, sa capacité à réagir rapidement et sa compréhension des différents défis auxquels les pays font face. Jamais dans l’histoire moderne, le monde n’a été confronté à un tel choc collectif pour ses économies et sa santé.
Le FMI a été un partenaire stable et proche de nous pendant la crise. Il a décaissé des ressources sans précédent au cours des six premiers mois de la crise, y compris à travers l’annulation de la dette des pays les plus pauvres par le biais de la facilité de crédit rapide. Au total, le FMI a décaissé plus de 30 milliards de dollars US en 2020 pour l’ensemble des économies africaines. Toutes les facilités ont été activées pour soutenir rapidement les pays.
Nous reconnaissons tous que le leadership a été un élément déterminant dans la riposte à la crise. Mme Kristalina Georgieva a fait preuve d’un leadership solide et stable pendant cette période de crise. À un moment où le multilatéralisme a cédé la place au vaccin et au nationalisme économique, le FMI, sous sa direction, a pu soutenir des solutions mondiales pour le bien commun. Lors de nos fréquentes rencontres avec elle, nous avons vu en elle une véritable partenaire. Bon nombre d’entre nous, ministres africains des Finances et de l’Économie – et, osons le dire, du reste du monde – connaissons, interagissons et collaborons avec Mme Georgieva depuis de nombreuses années. D’après notre expérience, elle a été un modèle de probité, une source d’énergie et de conseils qui nous ont permis d’avancer, et a fait preuve de la plus grande intégrité. À l’occasion de son deuxième anniversaire à la tête du FMI, nous pouvons affirmer avec confiance qu’elle a apporté une touche humaine au développement et au FMI.
Mme Georgieva a joué un rôle décisif dans l’allocation générale sans précédent de droits de tirage spéciaux (DTS) équivalant à 650 milliards de dollars américains et a fait preuve d’un leadership avéré. Elle a fourni des liquidités et des réserves tampons à de nombreux pays qui se trouvaient dans le besoin. Elle s’est battue pour faire progresser le multilatéralisme et nous avons toujours su qu’elle était une ardente défenseure des nations en développement. Elle a été un partenaire d’une valeur inestimable qui a contribué à nos succès collectifs.
Aujourd’hui, dans notre plaidoyer visant la rétrocession des DTS à hauteur de 20 à 35 % en vue de financer un mécanisme pour l’accès aux vaccins, un Fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance, un Fonds fiduciaire pour la résilience et la soutenabilité, une Facilité de liquidité et de soutenabilité destinée à soutenir les pays à revenu intermédiaire pour faciliter leur accès au marché et un mécanisme de rétrocession aux banques régionales de développement pour mieux prendre en main la reprise, Kristalina nous soutient et nous accompagne à chaque étape du processus. Elle travaille avec nous pour explorer les moyens d’allonger la maturité de la dette et de faire face à la crise climatique.
L’analyse comparative des mesures politiques mises en place par les pays a, sans aucun doute, été un instrument de progrès au sein de la communauté du développement. Si certains d’entre nous ne sont pas d’accord avec leur classement individuel dans l’indice Doing Business, nous nous accordons sur le fait que cet outil a permis à beaucoup parmi nous d’avancer dans nos programmes de réforme et nous a aidés à améliorer l’environnement des affaires, en particulier pour le secteur privé aux niveaux national et régional. En effet, l’amélioration de l’environnement des affaires et les réformes politiques connexes nous ont aidés, nous et notre secteur privé, à mieux réagir à la crise.
Bien évidemment, l’indice, comme bon nombre d’indices, n’est pas exempt de défauts et nous apprécions que, chaque année, la Banque et les pays se soient efforcés d’en affiner la méthodologie. Les allégations entourant l’édition 2018 du rapport Doing Business de la Banque mondiale sont graves et doivent faire l’objet d’une enquête. Toutefois, nous pensons également que cette enquête doit être menée de manière à ne pas porter atteinte à l’intégrité du FMI et, surtout, à permettre à Mme Georgieva, qui a réfuté ces allégations, de bénéficier d’une procédure juste et équitable.
Les nations africaines – et tous les pays – veulent des dirigeants indépendants et rigoureux à la tête des institutions multilatérales. Avoir des personnalités fortes comme Mme Georgieva répond cette exigence.
Si la communauté internationale se hâte de juger et marginalise des championnes comme Mme Georgieva, elle causera un préjudice irréparable à notre système mondial à un moment où nous devons combattre la COVID-19, lutter contre le changement climatique et relever bien d’autres défis.