Par Julien Briot*, expert en compliance.
Le secteur minier congolais regorge d’opportunités d’affaires qui ne sont désormais plus insoupçonnées. Centre névralgique de l’économie nationale, l’industrie minière est le point d’attention stratégique des politiques publiques et des projections de croissance nationale. État et investisseurs institutionnels joignent leurs efforts pour tirer parti de ce marché à forte valeur ajoutée.
Il est intéressant de rappeler que la République Démocratique du Congo est le premier pays producteur de cobalt au monde et abrite plus de 50% des réserves de la planète, principalement localisées dans les provinces du Haut-Katanga et du Lualaba.
Le cobalt, appelé aussi « or gris », est un métal qui fait grand bruit. Celui-ci sert à produire du tantale, qui sert à la fabrication des téléphones portables, des ordinateurs, des jeux vidéo ou des DVD, autant qu’à la fabrication des réacteurs nucléaires ou d’avion.
D’après les chercheurs de l’US Geological Survey, les principaux producteurs de cobalt en 2019 sont la République Démocratique du Congo, la Russie, l’Australie, les Philippines, Cuba et Madagascar.
Pour rappel, le secteur de l’extraction de cobalt en RDC a été particulièrement touché en 2010. En effet, le 15 juillet 2010, John Prendergast, conseiller spécial au Département d’État américain et directeur du bureau des Affaires africaines auprès du Conseil national de sécurité sous l’ère Clinton, avait préparé deux propositions de lois, à savoir : The Congo Conflict Minerals Act et The Conflict Minerals Trade Act.
Pour répondre aux différentes critiques, les accusant de financer la guerre civile en République Démocratique du Congo, Apple, Celestica, Cisco et IBM, regroupés au sein de la coalition citoyenne de l’industrie électronique ont lancé le Conflict-Free Smelter le 10 décembre 2010 dans le fait de faire attester par un organe indépendant que le minerai acheté par ces entreprises ne contribue pas directement ou indirectement aux conflits frontaliers.
Huit années après ces lois, le 9 mars 2018, l’ancien président de la République Démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila, a promulgué le nouveau Code minier imposant une meilleure transparence et la bonne gouvernance du secteur du cobalt, ainsi que sur la prise en compte de la responsabilité sociale et environnementale (RSE). On entend par RSE, la lutte contre le travail des enfants, la responsabilité de respecter les droits de l’homme, l’élimination de toutes les formes de discrimination, etc.
Par la suite, en décembre 2019, à son arrivée au pouvoir, le nouveau président de la République Démocratique du Congo (RDC) a fait de la lutte contre la corruption l’une de ses priorités. « Je serai intraitable dans la lutte contre la corruption » a-t-il répété à deux reprises, lors de son allocution. Pour atteindre son objectif, Félix Tshisekedi, le nouveau président de la République Démocratique du Congo (RDC) a mis en place « une juridiction spécialisée dans la lutte contre la fraude fiscale, le blanchiment des capitaux ainsi que le détournement des deniers publics », nommée l’Agence de prévention et de lutte contre la corruption ou « ALPC ».
A bien des égards, les différents gouvernements de la République Démocratique du Congo ont fait de la compliance une priorité. Et par transposition, le secteur minier congolais gagnerait à la reprise par des cabinets d’experts en compliance, spécialisés dans la mise en conformité des sociétés d’exploitation aux normes juridiques, économiques et financières nationales et internationales. L’ouvrage est simple : rapporter à l’industrie minière des solutions grandement éprouvées et maîtrisées parmi les opérateurs bancaires.
Il faut savoir que la compliance constitue un outil d’une remarquable efficacité pour prévenir le risque de corruption et les irrégularités au sein des entreprises extractives, à qui elle garantit une solution au déficit de visibilité et de financement dans le marché des capitaux. Avec ses mécanismes d’audit et d’analyse financière, elle permet de sécuriser et de contrôler les processus opérationnels allant de l’extraction à la commercialisation avec sécurité, fiabilité et traçabilité. Avec ses mécanismes financiers et comptables, elle permet de rapprocher les directions d’entreprises minières aux marchés capitaux en accommodant les documents comptables, les informations financières aux normes des places financières et aux sociétés d’investissements. Les pouvoirs publics et les opérateurs locaux gagneraient à promouvoir cette solution afin notamment de capitaliser sur les efforts fournis au fil des années pour attirer des investisseurs dans ce marché très porteur.
À propos de l’auteur
Julien BRIOT est un expert en compliance qui a travaillé dans différents secteurs d’activités (dans l’énergie au sein de la direction de Total E&P, dans le financement de projets d’infrastructures, dans un véhicule d’investissement de l’Etat français, dans le secteur bancaire chez BNP Paribas et BMCE Bank) et à l’international (Luxembourg, Maroc, Tunisie et Sénégal).