« C’est au CAMPC que se joue le destin des Etats africains »
Propos recueillis par Mireille Patricia Abié
Le conseil d’administration du Centre africain de management et de perfectionnement des cadres (Campc) a tenu sa 36e session le 8 décembre 2021. En marge cette rencontre statutaire, le Centre qui totalise plus de quarante ans d’existence a célébré ses premiers diplômés. Dans cet entretien, le Professeur Joseph Kaudjhis, directeur général du Campc, évoque avec Financial Afrik, les perspectives de cette institution panafricaine.
La 36e session du conseil d’administration du Campc s’est tenue le 8 décembre 2021 à Abidjan. De quoi a-t-il été question lors de ces assises ?
Cette session est une rencontre statutaire du Centre. Elle avait pour but de faire le bilan des activités du directeur général tout au long de l’année écoulée et de réfléchir sur les perspectives en matière de financement et de redynamisation du Campc.
Ces perspectives portent essentiellement sur l’extension du Centre aussi bien en Côte d’Ivoire que dans les pays membres et la création de nouvelles filières des formation innovantes. En Côte d’Ivoire par exemple, nous avons un projet de création de nouvelles infrastructures sur le site d’Abidjan-Cocody et un projet de construction d’un grand centre de formation continue et de renforcement des compétences à Yamoussoukro. Au Burkina Faso, il y a le projet de construction de la Représentation du Campc à Ouagadougou. C’est donc tous ces projets infrastructurels et académiques qui ont fait l’objet de débats au cours de cette 36ème session qui s’est tenue à Abidjan.
Ce sont des projets à longs termes ? Si non, quels seront les délais de réalisation ?
Ce sont des projets à court, moyen et long termes. Le projet de Ouaga est déjà engagé, nous allons d’ailleurs effectuer, dans les jours à venir, une mission au Burkina Faso, qui est un pays membre du Campc, pour discuter de la demande de parcelle introduite par la direction générale du Campc et qui va accueillir la représentation et ses annexes. Sur le site actuel d’Abidjan, l’extension des infrastructures a commencé et va se poursuivre. C’est le projet de Yamoussoukro qui est à long terme parce qu’il est très ambitieux et nécessitera de ce fait la mobilisation de financement important que nous recherchons déjà.
Le Campc est une institution qui fonctionne sur fonds propres. Mais vous étiez récemment à la recherche de financements additionnels. Qu’en est-il ?
C’est vrai que le Campc fonctionne à plus de 90% sur ses propres ressources. Mais lors de cette 36e session, nous avons eu l’assurance des pays membres que le Campc va très prochainement bénéficier d’un appui financier substantiel de leur part et des différentes entités représentées au conseil d’administration. Nous nous réjouissons de cet engagement des membres du conseil d’administration et restons confiants quant à l’avenir de ce Centre.
Parlant justement de financement. Dans un précédent entretien que vous aviez accordé à Financial Afrik, vous avez fait un plaidoyer en direction des Etats. Est-ce que votre appel a été entendu ? Ou c’est le statu quo depuis ?
Cet appel a été partiellement entendu parce qu’il y a des pays qui, chaque année, envoient leurs personnels en formation au Campc. Et c’est ce mode de financements que nous sollicitons aux pays membres. Nous n’attendons pas qu’on nous donne de l’argent en tant que tel. Ce que nous voulons, c’est que les États membres et même ceux qui ne le sont pas, sollicitent le Campc pour le renforcement des capacités de leurs personnels au lieu de les orienter vers d’autres institutions ailleurs. Il faut donc valoriser nos institutions, les solliciter. C’est la seule manière de les financer et d’assurer leur durabilité.
On sait qu’en plus des Etats membres, d’autres pays vous confient le renforcement des capacités de leurs cadres. Alors est-ce que le Campc, dont l’expertise est désormais avérée, a pu enregistrer de nouvelles adhésions ?
Pour le moment non. Nous sommes toujours à 6 Etats membres, mais les démarches sont en cours. Nous avons en effet déjà saisi certains États, dont les Représentations diplomatiques ont manifesté verbalement leur intérêt à revenir au sein du Campc. Cela ne nous empêche toutefois pas de recevoir les auditeurs des pays non-membres.
En tant qu’instrument intergouvernemental quel type de collaboration avez-vous avec les autres institutions du même type ? Notamment la Zlécaf dont l’objectif est de transformer le continent en un vaste marché ?
Nous n’avons pas pour le moment des contacts avec l’institution Zlécaf en tant que tel. Cependant, au niveau du marché commun africain, nous avons déjà commencé à sortir des frontières de l’espace Campc pour capter des marchés de formation. Nous envisageons très prochainement une rencontre avec les responsables de la Zlécaf pour voir dans quelle mesure le Campc peut soutenir ses ambitions. Nos institutions peuvent se soutenir mutuellement.
En marge de cette 36e session du conseil d’administration, le Campc qui compte plus de 40 ans d’existence a célébré ses premiers diplômés le 9 décembre 2021. Pourquoi maintenant ?
Il faut dire que pendant longtemps, la formation diplômante n’était pas la vision du Campc alors qu’elle figure bel et bien dans nos missions. Il y a trois années de cela que nous avons compris la nécessité d’en faire le levier des activités du Campc. Nous avons donc mis tout en œuvre pour avoir un effectif croissant d’auditeurs inscrits dans les formations diplômantes qu’on appelle au Campc les programmes longs par alternance. Cela a nécessité un renforcement de l’encadrement et du suivi des auditeurs et aussi une révision des curricula qui depuis 2019 sont au format LMD. Ce sont toutes ces actions mises en œuvre qui ont redynamisé la formation diplômante au Campc et qui ont permis d’organiser cette cérémonie de graduation au cours de laquelle 125 auditeurs diplômés du Campc ont été honorés.
Et quelle est la valeur académique d’un diplôme obtenu au Campc ?
Le diplôme du Campc n’a pas seulement une valeur purement académique. C’est avant tout un diplôme professionnel. C’est-à-dire que le titulaire dispose, dès sa sortie de la formation, de qualifications pour exercer en entreprise. C’est ce qui fait la particularité de notre formation. Le diplôme du Campc donne donc des qualifications, des compétences à son titulaire. Il peut donc automatiquement servir dans une entreprise. Il n’a pas besoin de recyclage parce que nos programmes ont une orientation métier. Les diplômés du Campc ont donc une valeur ajoutée qu’on ne trouve pas dans les autres établissements. Il y a aussi le statut du Campc qui est une institution qui bénéficie d’un ancrage international.
Quel appel pouvez-vous lancer en direction de ceux qui considèrent encore, à tort ou à raison, le Campc comme un centre de formation élitiste ?
Le Campc est certes un centre de formation d’élites, mais il n’est pas réservé aux seules élites. Il est ouvert à tous les professionnels et a pour mission de les accompagner dans le développement de leur potentiel. Les professionnels africains ont besoin d’une institution propre à l’Afrique, capable de les accompagner dans leur projet de formation continue et de renforcement des capacités. Le Campc est la meilleure référence dans le domaine, car c’est là que se joue le destin de nos États en matière de formation. Tous les professionnels, qu’ils soient du public ou du privé, ont désormais au Campc la réponse à leurs différents besoins en formation. Un dispositif innovant a donc été mis en place qui leur permet d’accéder aux différents programmes de formation aussi bien en présentiel qu’en ligne. Investir dans la formation au Campc, c’est l’assurance d’une vie professionnelle réussie.