En réponse à la pluie de sanctions de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cédéao) et de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa), les Maliens sont sortis massivement ce vendredi 14 janvier, à l’appel du gouvernement, pour manifester et dénoncer les décisions des deux organisations régionales. A Bamako, la capitale, le Boulevard de l’indépendance a notamment été pris d’assaut.
D’entrée de jeu, le Premier ministre Choguel Kokalla Maiga, qui a transmis les salutations du président Assimi Goita, a affirmé qu’il est important que la communauté internationale comprenne le peuple malien. « Il ne faut pas qu’elle se trompe. Il y a des choses qui ne se passent pas au Mali », a-t-il déclaré. Poursuivant : « Le destin de l’Afrique se joue au Mali aujourd’hui. Nous avons eu beaucoup de félicitations des pays de l’Afrique y compris les pays de la Cédéao. Merci au peuple Africain ».
Dans son intervention, le Premier ministre a indiqué que « le monde est solidaire avec le peuple malien » dans cette crise. « Je voudrais saluer la Guinée pour son soutien en refusant les décisions de la Cédéao. Nous saluons également la Russie et la Chine parce que ces pays ont refusé de voter des sanctions illégales et illégitimes contre le peuple malien. Nous saluons également le soutien de l’Algérie et la Mauritanie. Nous savons que même au sein de la Cédéao, il existe des chefs d’Etat qui ne sont pas d’accord avec les décisions prises contre le Mali. Il est important que la communauté internationale comprenne le peuple Malien », a laissé entendre Choguel Maiga.
Le soutien des Etats Unis demandé
Intervenant également devant la foule, Mohamed Ousmane AG Mohamedoune, membre du Conseil national de la transition, a indiqué que le colonel Assimi Goita est un « président digne ; un président qui se bat pour la sauvegarde de la souveraineté du Mali ». Et d’ajouter : « la France est en train de nous opposer. Elle cherche à nous opposer. (…) »
« Nos soldats sont en train de mourir à cause des mauvaises politiques. Les armées africaines doivent libérer l’Afrique. Les Maliens n’ont pas de problème entre eux, c’est la France qui divise le peuple malien depuis plusieurs années. Je lance un appel aux Américains de ne pas soutenir les jeux de la France », a-t-il dit.
A son tour, Sina Damba, ancienne ministre et porte-parole du Réseau des femmes anciennes ministres et parlementaires du Mali a expliqué que le gouvernement de transition a le soutien des femmes du pays. « Les femmes du Mali soutiennent la transition. Les femmes soutiennent le colonel Assimi Goïta et le premier ministre Choguel Kokalla Maiga. Le peuple malien dénonce les sanctions de la Cédéao et de l’Uemoa », a-t-elle déclaré.
« Quand le peuple africain est de cœur avec le peuple malien dans sa lutte contre toute forme d’injustice sous-régionale, chacun et chacune des Maliens doit se déhancher cet après-midi à la place de l’indépendance avec un drapeau Vert-Or-Rouge pour magnifier son patriotisme. Nous disons non à toute sanction sous-régionale tant que la voie du dialogue est ouverte par nos autorités de la transition », a fait savoir Mamadou Camara, ancien dignitaire d’Ibrahim Boubacar Kéita, fin défenseur de la Transition qui s’était déplacé au Boulevard de l’indépendance.
La relation diplomatique Mali-France mise en cause
« Nous devons couper nos relations diplomatiques avec la France. Nous n’aimons pas la France aujourd’hui ni demain. Nous sommes déterminés à montrer que ces sanctions de la Cédéao sont nulles et sans effets », a déclaré Jeamille Bittar, un des porte-paroles du Mouvement du 5 juin et rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) du Mali, initiateur des premières mobilisations contre le président IBK.
Plus loin, elle dira que son organisation dénonce avec la dernière rigueur les sanctions de la Cédéao et de l’Uemoa. « Nous n’acceptons pas les décisions de la Cédéao. C’est un complot pris contre le Mali. Même en voyant les textes de l’ONU, aucun pays ne prend des sanctions contre un pays enclavé comme le Mali. Suite à ces sanctions de la Cédéao, tous les pays Africains soutiennent le Mali, le peuple d’Afrique ».
Pour sa part, Adama Ben Diarra alias Ben le Cerveau, chantre de la relance des coopérations entre le Mali et la Russie, a laissé entendre que « c’est le début de la fin de la Françafrique en Afrique ».
Le message du chérif de Nioro transmis par ses adeptes
A travers une déclaration lue par des adeptes de chérif de Nioro, Mohamed Cheickné Hamaoulla a exhorté les autorités de la transition à ne pas céder face aux menaces de la communauté internationale et dira que « les décisions de la Cédéao sont formulées contre notre pays. Nous vous exprimons donc notre rejet face à ces décisions. Notre peuple tire sa foi en sa force. Nous avons un peuple digne et fier. Nous soutenons les autorités de la Cédéao. Nous soutenons le Premier ministre Choguel Kokalla Maiga et soutenons le colonel Assimi Goïta ».
Présent à l’occasion, le colonel Abdoulaye Maiga, porte-parole du gouvernement, a déclaré que la préoccupation d’Assimi Goïta est le retour à l’ordre constitutionnel. « Le chef de l’Etat a décidé de s’assumer, tout comme l’Uemoa et la Cédéao se sont assumées. Il n’y a pas un autre pays de la Cédéao qui a été sanctionné plus que le Mali. C’est pourquoi le président Assimi Goïta a validé un plan de riposte du gouvernement », a fait savoir le ministre de l’Administration territoriale.
« Nous avons montré que le Mali nous appartient. Les Maliens ont parlé partout dans nos communes, dans les cercles, dans les capitales régionales et enfin les Maliens se sont parlés au niveau national. Après les assises, nous avons informé la Cédéao à travers les résolutions des assises », a déclaré le ministre de la Refondation de l’Etat, Ibrahim Ikassa Maïga.
« Malgré cela, la Cédéao nous a frappé avec trois bâtons : la suspension du Mali dans ses instances, la suspension des membres du gouvernement et les personnalités de la transition et une pluie de sanctions économiques contre le peuple malien. Nous disons aux autorités de la Cédéao que nous dénonçons les décisions injustes, illégales et illégitimes de l’organisation », a-t-il dit.
Notons que dans un communiqué de presse publié le 13 janvier 2022, l’opposant Tiébilé Dramé avait demandé aux autorités de la transition de « rassembler la classe politique afin de convenir sur un plan de sortie de crise entre le Mali et la communauté ouest-africaine. Pour lui, « les sanctions émanent de l’irrespect des textes du pays et de la violation de la charte ».