En adoptant les portefeuilles digitaux de Skaleet, les banques peuvent proposer un service innovant à leurs clients et en tirer des revenus. En théorie, la taille du marché n’est pas limitée, affirme Yves Eonnet.
Les banques d’Afrique et du reste du monde sont confrontées à un bouleversement inédit. Si elles ne parviennent pas à se digitaliser et à adopter de nouvelles approches, elles perdront à terme leurs clients et leur raison d’être. L’innovation technologique rapide qui a entraîné une transformation du secteur bancaire a contraint de nombreuses banques à réévaluer fondamentalement leur stratégie commerciale.
Avec l’un des secteurs bancaires les moins développés au monde, l’Afrique est au cœur de cette tension entre innovation et inertie. « Ce bouleversement inquiète beaucoup les banques », indique Yves Eonnet, président et cofondateur de Skaleet, une société basée à Paris qui propose des services de Core Banking aux institutions financières en Afrique et en Europe. «Mais c’est une rupture à laquelle toutes les banques du monde devront faire face », ajoute-t-il.
Un immense potentiel
Anciennement connue sous le nom de TagPay, Skaleet aide les banques à se digitaliser en leur proposant des solutions de Core Banking et des services clés tels que des plateformes de paiement.
En adoptant les portefeuilles digitaux de Skaleet, qui peuvent être connectés à un nombre illimité de canaux de paiement et de fournisseurs de services externes, les banques proposent un service innovant à leurs clients et en tirent des revenus. En théorie, la taille du marché n’est pas limitée, elle dépend uniquement du nombre de banques, selon M. Eonnet.
Skaleet travaille actuellement avec 22 institutions financières en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale, et s’intéresse au Maghreb et à l’Afrique de l’Est. Mais en raison du caractère relativement récent du secteur, il est difficile de quantifier le véritable potentiel de l’industrie.
« Il faut voir notre activité comme une activité émergente, la taille du marché n’est pas définie à ce stade », précise-t-il. «On ne peut pas la mesurer. Chaque banque devrait s’intéresser à notre technologie ou à celle de nos concurrents, mais nous n’en sommes qu’aux débuts. Pour l’instant, ce sont les pionniers ou les visionnaires qui font appel à nos services ».
Limites du marché
Cela dit, les limites actuelles du marché sont l’hésitation et la réticence à adopter les nouvelles technologies, mais cela changera à mesure que les services seront mieux compris et adoptés.
Selon M. Eonnet, certaines banques africaines sont conscientes de la nécessité de se digitaliser, tandis que d’autres tentent de résister au changement et de poursuivre leurs activités comme d’habitude.
« Le problème que nous avons aujourd’hui, c’est que les banques, jusqu’ici, n’ont pas eu besoin de se transformer. Elles ne se sont pas adaptées à l’évolution de la technologie et à la demande des consommateurs », analyse-t-il.
« Mais aujourd’hui, elles sont concurrencées par les opérateurs de télécommunications et elles doivent changer, sinon elles perdront une partie de leur chaîne de valeur. Malgré cela, des banques fuient le problème plutôt que de s’y attaquer. »
Selon le président, il est impossible de prédire quelles banques sont prêtes à se lancer dans le changement et lesquelles ne le sont pas, mais le leadership et la vision des dirigeants sont essentiels.
Il ajoute qu’une grande partie de son travail consiste à expliquer aux banques la nécessité et l’intérêt d’adopter des services digitaux. Un partenariat réussi avec une banque dans un pays éveille généralement l’intérêt d’un grand nombre d’institutions financières vis-à-vis des services de Skaleet, conduisant ainsi à une multitude de projets.
Autre limite à la taille du marché : certaines banques préfèrent créer leur propre technologie plutôt que d’acheter les logiciels à un sous-traitant. Mais cela peut s’avérer plus coûteux et moins sécurisé que le recours à un tiers de confiance pour développer la technologie, estime M. Eonnet.
« Quand une banque conçoit sa propre plateforme, je pense qu’elle est plus exposée au piratage », prévient-il. « Le risque n’est jamais nul, mais nous sommes des experts dans ce domaine et nous avons une infrastructure très performante », assure-t-il.
En outre, de nombreuses banques pensent que les coûts d’intégration d’un logiciel externe sont beaucoup plus élevés qu’ils ne le sont en réalité.
« J’ai des clients en Europe qui ne signent qu’après trois ans de négociations et d’autres après trois semaines, et c’est la même chose en Afrique », confie-t-il.
« Le marché évolue rapidement ; les banques ne savent pas toujours quel choix faire. Celles qui sont au fait des évolutions peuvent prendre des décisions rapides, tandis que celles qui se familiarisent lentement avec le marché mettront plus de temps à réagir », conclut-il.