Si un coup d’Etat est un compte d’exploitation irrationnel, deux coups d’Etat c’est la banqueroute. En voulant s’arroger une transition de 5 ans en violation des coutumes et des règles de la CEDEAO, la junte malienne, auteur de deux putsch en août 2020 et en mai 2021, a provoqué une cascade de défauts de paiement techniques (180 millions de dollars à la fin février 2022) suivis d’une envolée du pricing du risque pays associé sur les lettres de crédit, de plusieurs centaines de milliards de Franc CFA de manque à gagner pour la douane et les impôts, de la dégradation de sa notation à l’international, ce qui est synonyme d’une quasi radiation sur le marché international de la dette et, last but not least, de la suspension des décaissements du FMI et de la Banque mondiale.
A l’heure où la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) annonce le dégel des avoirs de Bamako logés au sein de l’institution, certains experts, sous couvert de l’anonymat, parlent de « carnage » financier. Selon nos sources, l’Etat malien traine un déficit budgétaire de plus de 1000 milliards de FCFA. Les investisseurs actifs sur le marché intérieur de la dette, notamment au niveau du guichet de l’UMOA-Titres, s’attendent à une épuration rapide des échéances non honorées du 9 janvier 2022 à nos jours, avant d’envisager de nouveaux engagements envers un pays asphyxié qui, certes, a fait un pas en arrière, mais doit encore montrer plus de gages dans le respect du calendrier de retour à l’ordre constitutionnel.
Notons que l’UEMOA comme la BCEAO n’ont jamais coupé le robinet dans les faits, laissant les 15 banques commerciales maliennes se refinancer devant ses guichets en fonction de leurs capacités et de leurs besoins habituels, parfois en fermant les yeux sur les engagements hors sols de certaines d’entre elles et sur la définition élastique de produits pharmaceutiques, pétroliers, alimentaires et de base. Dans ces conditions extrêmes d’un Mali quasi-amputé de ses nombreuses années de réformes et de recherche d’une réputation honorable auprès des partenaires techniques, il faut être le ministre malien de l’Economie et des Finances, Alousséni Sanou, pour pronostiquer sur une croissance de 4% en 2022.