Suite à notre article du 5 octobre relatif au conflit d’actionnaires de la PME AGR, spécialisée dans le tri de déchets, nous avons reçu les précisions du groupe Duval, actionnaire minoritaire, en réponse à notre questionnaire.
Nous les publions estimant qu’elles sont factuelles et de nature à compléter les informations précédentes afin que le lecteur se fasse sa propre opinion.
Le Groupe affirme qu’il est « totalement faux » de prétendre qu’il a tenté de « passer en force pour prendre le contrôle d’AGR » et qu’il serait responsable des difficultés de cette société.
Pour Duval, c’est même le contraire qui s’est passé puisque c’est bien « le Directeur Général et actionnaire majoritaire, Edem D’Almeida, qui nous a proposé de nous racheter nos parts comme le stipule très clairement son courrier du 3 janvier 2022 » (NDLR : un document a été joint à cette affirmation).
Cette proposition est intervenue après l’échec d’un plan de relance et de restructuration des fonds propres de la société proposé par le même Gérant d’AGR, le 14 octobre 2020, aux actionnaires de la société, qui avait perdu beaucoup d’argent sur l’exercice 2019, qui anticipait une perte importante sur 2020 et qui devait rapidement faire une augmentation de capital.
« Le Groupe Duval a manifesté son intérêt à accompagner plus durablement l’entreprise dans sa consolidation au Togo et la conquête de nouveaux marchés notamment un déploiement à Abidjan. (…) Pour Duval, des synergies peuvent être développées entre les activités d’AGR et l’axe stratégique de développement du Groupe en Afrique et promouvoir la construction d’un leader panafricain du déchet et du recyclage et dans une logique d’investissements à impacts sociaux et environnementaux », peut-on lire dans ce document. Pour autant, « AGR fait face à l’urgente nécessité de reconstituer ses fonds propres (négatifs depuis 2013), et au défi d’un changement d’échelle avec la consolidation de son modèle au Togo. C’est ainsi qu’un effort est demandé à chaque Associé pour le sauvetage de l’entreprise, assainir son bilan et garantir sa pérennité. Ceci passe entre-autres par une augmentation significative du capital et l’apport de nouveaux capitaux ».
Dans ce plan, afin de résorber la situation financière de l’entreprise tout en finançant son développement, le Groupe Duval, « sous réserve d’un effort de tous les associés, accepterait une prise de participation majoritaire avec, d’une part, le souci de préserver les co-fondateurs d’une forte dilution en les laissant acquéreurs des participations du groupe CASTEL s’il confirme sa sortie, et d’autre part la possibilité d’un nouvel apport en compte courant pour un montant minimum de 250 M FCFA ».
Cette phrase est très claire : non seulement il est bien dit que le Groupe Duval « accepterait » et non « souhaiterait » et encore moins « imposerait » une prise de participation majoritaire, mais en plus, Duval s’engage à « préserver les co-fondateurs d’une forte dilution ».
Du reste, Duval reconnait que les parties ne se sont pas entendues sur les modalités d’augmentation de capital, ce qui l’a conduit à envisager une sortie du capital, à l’instar de l’autre actionnaire minoritaire Castel, en accord avec Mr d’Almeida, qui voulait ouvrir son capital à de nouveaux actionnaires.
L’offre de rachat dont nous avons copie, envoyée par Mr d’Almeida, le 3 janvier 2022, mentionne en effet : « Conformément à la volonté de votre groupe, exprimée à différentes reprises après notre dernière Assemblée Générale Extraordinaire en date du 30 juin 2021, de vous retirer du capital de la société Africa Global Recycling « AGR ».
Devant une telle situation, comment expliquer ce qui apparaît comme un échec voire comme un gâchis tant le positionnement d’AGR répondait à des enjeux évidents en termes d’impacts dans la gestion des déchets ?
« Au même titre que notre investissement par exemple dans Valudo, à Sao Tomé, qui transforme la coco sur place pour l’exporter, en ayant structuré la filière et créé une centaine d’emplois directs, avec AGR nous n’avions pas d’enjeux de retour sur investissement. Nous voulons simplement ne pas perdre notre investissement et accompagner les entreprises dans leur croissance pour que l’impact soit le plus positif. Avec AGR, nous avons perdu notre investissement, ce que nous déplorons pour nous même mais aussi pour AGR car nous avons cru à ce projet en termes d’enjeux environnementaux. Les erreurs de management et de gestion d’un actionnaire majoritaire par ailleurs Directeur Général ne peuvent être imputés à un actionnaire minoritaire qui n’a été à aucun moment ni agressif ni offensif », explique le Groupe. Avant de conclure avec évidence : « Par ailleurs, quel intérêt supposé pour un Groupe qui pèse au total 1 milliard d’euros de mettre la main sur une société aux abois ?
Concernant l’ensemble des activités du Groupe Duval en Afrique, et en réponse à un certain nombre de deals qui ont échoué, le groupe familial reconnaît bien volontiers qu’au-delà d’AGR, en 5 ans d’investissements en Afrique, 3 deals seulement ont « mal tourné » pour reprendre notre terme. Il s’agit de la Banque de Développement des Comores, de la société Atlas et de Finadev au Bénin.
« C’est la vie des affaires et cela n’altère en rien la volonté du Groupe » de se développer notamment dans l’immobilier, les assurances et la micro-finance. Le Groupe Duval, engagé également dans les forages d’eau avec une Fondation, estime avoir déjà de belles histoires et de vrais succès écrits sur le continent avec des partenaires comme le réseau de microfinance et d’assurance FINAFRICA lancé en 2018 et qui a intégré avec succès 3 filiales : FINADEV GUINEE , institution de microfinance, FOCEP, au Cameroun, institution de microfinance, FINAFRICA ASSURANCES SENEGAL, anciennement SALAMA. Grâce à l’appui du Groupe, notamment en matière de digitalisation, ces sociétés sont dans une dynamique de croissance très forte, et quatre nouvelles acquisitions sont par ailleurs en cours de closing au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Burkina et au Sénégal. La trajectoire du Groupe Duval sur le continent n’en est qu’à ses débuts selon ses dirigeants.