Par Mamadou DIALLO, Président (2015-2019), Sciences Po Alumni Côte d’Ivoire.
J’évoquerai la mémoire de M. Pathé Dione en rappelant sa contribution à un événement organisé par de jeunes cadres sans budget mais avec des idées. Nous voulions échanger d’un sujet d’actualité, « à forte valeur ajoutée », et stratégique pour notre région. Il s’agissait du lancement des « Alumni de Sciences Po en Côte d’Ivoire » – l’avatar d’une « Association des Anciens » créée voici plus de 30 ans et qui s’était fait discrète. Après avoir approché son fondateur, Serge Thiémélé, il nous exhorte à innover en toute indépendance – et avec son entier soutien. Le 11 janvier 2017, Haby Niakaté et moi rencontrons un Ancien de la rue Saint-Guillaume, franco-malgache, alors en poste à Abidjan.
Georges Serre, ambassadeur, est curieux. Après avoir évoqué le souvenir d’une connaissance commune – Georges Balandier-, la conversation porte sur « politiques publiques, développement et infrastructures ; On « refait le monde » et nous obtenons la mise à disposition gracieuse d’une salle de la Résidence de France pour continuer la discussion. Plusieurs mois plus tard, munis d’une note conceptuelle et recommandés par notre influent condisciple, Jean-Louis Billon accepte le principe d’un débat modéré avec lui. Pour une conversation franche et exigeante sur la « croissance », nous souhaitons que les lumières d’un homme d’affaires complètes celles du diplomate et du ministre.
Deux critères s’imposent : leadership économique à Abidjan (« capitale économique de l’UEMOA ») et « conquête de marchés » à l’échelle panafricaine. Nous pensons au Groupe SUNU, rêveurs mais déterminés. Approchons la direction de la communication. Puis attendons, jusqu’à ce que je reçoive un SMS. Dimanche 14 mai 2017, 12 :42 : « Bjr Mamadou. M Dione a marqué son accord pour participer à votre manifestation d’Abj. Mohamed Bah » (alors Directeur Général Délégué). Ensuite, professionnel et exigeant, le fondateur du Groupe SUNU se rend disponible.
Un entretien a lieu avec (une partie de) l’Etat-major. Questions brèves, accord sur les conditions de sa participation puis instructions et … « exécution » ! Le jeudi 15 juin, lors de la conférence ouverte par Serge Thiémélé et modérée par Haby Niakaté, le Doyen des panélistes livre la vision d’un mathématicien et parle avec l’assurance d’un self-made-man. Homme de chiffres et d’idées, il partage sa lecture (stratégique) de notre conjoncture. Dépêche de l’Agence Ivoirienne de Presse (AIP) – 18 juin 2017 : « Pour le président directeur général et fondateur du groupe SUNU, Pathé Dione, il est important de s’interroger sur la qualité [et ] le contenu de la croissance estimant qu’une croissance basée sur une économie de rente est une croissance de « mauvaise qualité ». Il a indiqué que la volatilité des prix des matières premières n’assure pas aux économies dépendant de ces spéculations, une croissance durable ».
Article de « La Diplomatique d’Abidjan » – 24 juin 2017 : « La croissance ne doit pas uniquement reposer sur la construction des infrastructures. Il faut nécessairement une transformation locale de nos matières premières localement » – dit-il avec force devant une audience comptant plusieurs membres du gouvernement. Enfin, il « a surtout exhorté les africains à faire confiance au potentiel local, prenant l’exemple de sa propre entreprise qui est à ce jour présente dans une quinzaine de pays d’Afrique de l’Ouest et Centrale ». A mon humble niveau, je conserve le souvenir d’un homme entraperçu, le temps d’un rendez-vous professionnel, d’un événement public et au sortir de la mosquée de Plateau.
La dernière fois, voici trois ans, il s’agissait d’un vendredi -jour de forte affluence, alors que les fidèles empruntaient les marches de l’édifice conduisant vers l’avenue Crosson Duplessis. J’avisais un homme grand, fin et hiératique marchant à pas comptés. Le port altier, l’esprit concentré, il semblait réciter son chapelet en regagnant le siège de son Groupe situé à quelques centaines de mètres.
Seul, simple et « souverain » – il poursuivait son chemin, et offrait une leçon d’humilité et de modestie au jeune homme que j’étais. C’est l’image, fugace, que je conserve de cet homme rappelé par son Créateur et dont l’œuvre est un exemple. En pular, nous disons « Yo Allah yaafo bhe, rokka malal e aljanna » – Que Dieu lui offre le pardon, la félicité éternelle et le paradis » ! Amina. Enfin, pour ceux qui aiment « penser en gardant les pieds sur terre », en hommage à sa personnalité, voici certains éléments de sa réponse à une question lancinante : « la croissance, pour quoi faire ?» : https://www.jeuneafrique.com/453733/economie/croissance-quoi-faire/.