Dans sa dernière notation publiée ce week-end, l’agence S&P Global Ratings a confirmé les notes de crédit souverain à long et à court terme en devises étrangères et locales du Congo-Brazzaville à « CCC+/C », soit seulement deux crans avant le défaut de paiement. Si l’agence maintient les perspectives stables à propos de la solvabilité du Trésor congolais, elle exprime néanmoins des inquiétudes sur l’incapacité du pays à retrouver des marges budgétaires.
Les perspectives stables adossées à la note souveraine sont d’emblée assorties d’une réserve des analystes de l’agence S&P. En langage moins technique, cela veut dire qu’il ne faut pas les surinterpréter. L’agence de rating relève que l’amélioration des conditions de croissance et de liquidité grâce à des recettes pétrolières plus élevées, contraste avec les difficultés persistantes à sécuriser le financement budgétaire. D’où cette mise en garde à peine voilée : « S&P pourrait dégrader les notations souveraines du pays s’il y a des indications que le gouvernement inclut tout ou partie de l’encours de la dette commerciale dans toute restructuration de dette prévue, ou si un nouveau stress de liquidité compromet gravement sa capacité à tenir les engagements envers les créanciers obligataires ».
S&P Ratings Global n’exclut pas l’hypothèse d’une révision à la hausse de la note : « Nous pourrions relever les notations si nous percevions une probabilité plus faible de restructuration future de la dette commerciale. Cela pourrait être le cas si, par exemple, les perspectives économiques se renforcent au-delà de nos attentes actuelles ou si nous constatons une amélioration des résultats de la mise en œuvre du programme du FMI », soulignent les analystes de l’agence. Mais cette probabilité reste faible si l’on s’en tient aux perspectives macroéconomiques du pays que brosse l’agence de notation.
Le rating souverain du Congo-Brazzaville reste soumis à l’incertitude sur le service de la dette et à une situation budgétaire fragile, le pays restant dépendant du rebond des conditions économiques pour faire face à ses engagements financiers. Si le gouvernement bénéficiera des excédents budgétaires sur la période 2023-2026, le poids de l’amortissement de la dette restera trop important, ce qui est de nature à menacer les remboursements si le gouvernement ne parvient pas à obtenir une restructuration.
La dépendance du pays à l’égard du secteur pétrolier reste un risque, compte tenu d’un ralentissement prévu des prix du baril et d’une croissance atone de la production, qui pourraient freiner la croissance ainsi que les soldes budgétaire et courant.
Si le Congo-Brazzaville « bascule en enfer », il n’en sera pas à sa première expérience. Ce pays a fait défaut à deux reprises sur son euro-obligation en 2016 et 2017, rappelle S&P Ratings Global. Cette perspective est donc une hypothèse probable. Bien que les conditions de liquidité se soient assouplies notamment grâce au programme du FMI signé en décembre 2019, le Congo-Brazzaville a eu beaucoup de peine à obtenir un financement l’année dernière en raison de retards du déblocage de la ligne de crédit du Fonds. Rien de surprenant, semblent dire les analystes de S&P Ratings car « le bilan de ce pays en matière de mise en œuvre des programmes et des réformes du FMI est plutôt médiocre ».
Trop dépendant du pétrole
L’économie congolaise dépend essentiellement d’une production pétrolière volatile et erratique, qui représente 80 % de ses exportations et 45 % du PIB.
La croissance du PIB atteindra 3,7 % en 2023 et une moyenne de 3,3 % de 2023 à 2026, après un taux 2,6 % l’année dernière. Le pays a bénéficié des prix élevés du pétrole, qui ont assoupli les conditions de liquidité dans l’économie. La consommation intérieure a été soutenue par le paiement des arriérés intérieurs par le gouvernement.
La production du secteur pétrolier, qui représentait environ 45 % de l’économie avant la crise du Covid-19, devrait progressivement remonter à 320.000 barils par jour d’ici 2026 contre seulement 280.000 en 2022, mais reste inférieure aux 337.000 barils/jour de 2019.