Selon l’AFIS, les institutions financières africaines sont devenues des cibles de choix pour les cybercriminels, et le secteur doit prendre cinq mesures essentielles pour renforcer la gouvernance et préserver la confiance des parties prenantes.
Par Franck Kie, Clément Combary, Ali El Azzouzi & Nvalaye Kourouma
Un rapport de Dataprotect, entreprise spécialisée dans la cybersécurité, souligne qu’au moins 85 % des institutions financières ont déjà été victimes de cyberattaques. Le baromètre 2022 du secteur financier réalisé par le cabinet de conseil Deloitte démontre que la cybercriminalité est la première préoccupation des banquiers.
Face au risque de subir des dommages financiers, de perdre leur crédibilité auprès des parties prenantes et d’être sanctionnées par les autorités de régulation, les institutions financières n’ont plus d’autre choix que de s’armer contre la cybercriminalité. La cybersécurité reste au cœur de leur agenda stratégique.
Dans le prolongement du travail de réflexion mené par l’AFIS, la première plateforme des leaders financiers africains, nous avons identifié cinq priorités pour créer un secteur financier sûr en Afrique.
1. CRÉER DES DÉPARTEMENTS DÉDIÉS À LA CYBERSÉCURITÉ
Face à l’ampleur des menaces cyber, les institutions financières africaines doivent investir massivement dans la protection de leurs données sensibles pour préserver la confiance des parties prenantes. Pour y parvenir, elles doivent créer au sein de leur organisation des départements exclusivement dédiés à la cybersécurité et structurés en sections spécialisées.
Elles doivent aussi recruter des Responsables de la Sécurité des Systèmes d’Information (RSSI) pour gérer la sécurité informatique et des Directeurs des Systèmes d’Information (DSI) qui travailleront activement à la prévention, la détection et la résolution des incidents.
2. RENFORCER LES COMPÉTENCES CYBER DE L’ORGANISATION
Sensibiliser les collaborateurs à l’identification et l’anticipation des menaces cyber est désormais une obligation pour les institutions financières africaines. Les enjeux de la cybersécurité sont encore flous pour de nombreux collaborateurs et il existe un manque d’expertise locale. Aussi, les institutions financières doivent encourager les formations continues en s’associant à des entreprises leaders du domaine, et évaluer régulièrement la maturité des collaborateurs sur le sujet.
3. UN CADRE RÉGLEMENTAIRE ADAPTÉ AUX INSTITUTIONS FINANCIÈRES
Les gouvernements doivent encourager les efforts des institutions financières africaines en développant un cadre réglementaire qui répond de façon spécifique à leurs besoins en matière de cybersécurité. Ils peuvent aussi élaborer des politiques qui soutiennent les tests d’intrusion annuels et les procédures de gestion des vulnérabilités pour évaluer si les risques cyber sont gérés de manière appropriée.
4. AGIR EN COMMUN POUR ÉDUQUER LES SOCIÉTÉS CIVILES
Il est primordial d’investir dans le capital humain en cybersécurité. Les populations doivent apprendre à s’approprier les outils du numérique sans en craindre les menaces. Les institutions financières et les gouvernements doivent agir ensemble pour créer des espaces d’éducation à la cybersécurité, car le risque est mondial. Les parties prenantes doivent développer et réévaluer constamment les meilleures pratiques.
5. NE JAMAIS MINIMISER LES RISQUES
Enfin, malgré toutes les dispositions de prévention et de détection, il est important de ne jamais minimiser les risques cyber. Les technologies évoluent rapidement, se complexifient et se multiplient, et nos processus actuels ne seront peut-être plus valables demain. À l’avenir, les institutions financières devront se digitaliser encore davantage. Afin d’anticiper les risques, elles doivent mettre en place une veille continue pour s’informer sur les nouveaux types de menaces et être prêtes à innover constamment.
- Franck Kie, Fondateur et Managing Partner de Ciberobs Consulting, Commissaire Général du Cyber Africa Forum
- Clement Combary, Group Head of IT & Digital Transformation, Coris Holding SA
- Nvalaye Kourouma, Directeur numérique du Groupe Ecobank
- Ali El Azzouzi, Fondateur et Directeur Général de Dataprotect