Nouveau remous dans la diagonale sèche de l’Afrique. Le Soudan a été réveillé ce 15 avril 2023 par le bruit des affrontements entre ses deux généraux en cohabitation difficile depuis le le coup d’État du 25 octobre 2021. L’armée dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, qui administre de facto le pays, fait face aux Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo, dit «Hemedti» considéré comme l’un des hommes les plus riches du pays.
Les deux officiers qui ont chassé les civils du pouvoir s’observaient en chien de faïence depuis plusieurs semaines. Pendant que ses forces affirmaient avoir pris contrôle du palais présidentiel, Hemetti déclarait à la chaîne qatarie Al-Jazira que ses combattants « ne s’arrêteraient pas avant d’avoir pris le contrôle de l’ensemble des bases militaires », qualifiant son ancien allié et désormais rival de « criminel ayant détruit le pays ». C’est une bataille à mort qui est engagée, faisant suite à l’échec des négociations.
La médiation conduite récemment par le diplomate tchadien Moussa Faki Hamat, président de la Commission de l’Union Africaine, n’aura finalement servi qu’à repousser l’échéance. Derrière la crise politique, couve une crise économique et sociale sans précédent avec une inflation estimée à 63,3% en mars, certes loin du pic de 359% atteint en 2021.
Jeudi, l’armée dénonçait déjà un déploiement « dangereux » des paramilitaires à Khartoum et dans d’autres villes du Soudan « sans l’approbation ni la moindre coordination avec le commandement des forces armées ». Elle tirait alors « la sonnette d’alarme » face à « un tournant dangereux et historique ». Car depuis des jours, alors que civils et communauté internationale étaient forcés d’accepter un nouveau report de la signature d’un accord politique censé sortir le pays de l’impasse – à cause des divergences entre les deux généraux -, des vidéos ne cessaient de montrer depuis différents quartiers, l’arrivée de très nombreux blindés et d’hommes, notamment à Khartoum.
L’avenir des paramilitaires est désormais la principale question au Soudan : tout retour à la transition démocratique est suspendu à leur intégration au sein des troupes régulières. Si l’armée ne la refuse pas, elle veut malgré tout imposer ses conditions d’admission et limiter dans le temps leur incorporation. Le général Daglo, lui, réclame une inclusion large et, surtout, sa place au sein de l’état-major.