Un sondage réalisé par un cabinet londonien le donne perdant. Mais il en faudra plus pour contraindre Emmerson Mnangagwa, 80 ans, candidat à sa propre réélection, de renoncer à se présenter le 23 août devant ses 16 millions de concitoyens pour des élections générales (présidentielles, législatives et locales) aussi tendues qu’indécises.
Dans un Zimbabwé où le taux d’inflation, quoique réduit de 285 à 101%, est l’un des plus élevés au monde, aux côtés de la Syrie et du Liban, l’opposant en chef est d’abord la hausse des prix. La monnaie locale, le dollar zimbabwéen, en chute de 40% cette année, peine à faire face au dollar américain. D’où cette tentative de la «tokeniser» en permettant à ses détenteurs de convertir leurs fonds en or pour se protèger de lhyperinflation. Mais le projet porté par la Reserve Bank of Zimbabwe (RBZ) se heurte aux mises en garde du FMI.
En dépit de ces difficultés, il y a peu de certitudes de contraindre le tombeur de Mugabe en 2017, lors d’un coup d’Etat atypique, de lire «L’art d’être grand père» de Victor Hugo. Peu de certitudes aussi de contraindre la Banque Mondiale et le FMI de financer un pays qu’ils boycottent depuis deux décennies. A moins d’une alternance.
Paradoxal peut être, la Bourse de Hararé affiche la plus forte hausse au monde depuis janvier dernier. Le gouvernement sortant a réussi à stabilisé le déficit sous la barre de 3% sous la conduite du professeur Mthuli Ncube, ministre de l’Economie et des Finances, qui figurait dans le top 5 des meilleurs ministres africains de Finance établi par Financial Afrik en 2020-2021. Le taux de croissance moyenne sur les cinq prochaines années est projetée à une moyenne de 5%.
L’ancien chef économiste de la BAD peut se targuer d’avoir mis en place les conditions d’un retour du pays dans le concert des nations éligibles aux concours des bailleurs. La meilleure récolte de blé sur les cinquante dernières années réalisée l’année dernière démontre le succès des réformes agricoles.
Des performances contrastées qui risquent de n’être guère suffisantes pour le leader du ZANU PF, parti de libération, au pouvoir depuis 1980. Ces élections opposent de nouveau le «Crocodile » (nom de Emmerson Mnangagwa lord de la guerre de libération) – à Nelson Chamisa, 45 ans, avocat et pasteur, désormais chef d’un parti relativement nouveau, la Citizens Coalition for Change (CCC).
Cette formation issue de la scission
en 2022 de l’Alliance du Mouvement pour le changement démocratique (MDC-A), lui-même sorti du Mouvement pour le changement démocratique (MDC-T), le parti fondé par feu Morgan Tsvangirai en 1999, a perdu de justesse lors des dernières élections générales de 2018.
En effet, Mnangagwa avait remporté le vote de justesse avec 50,3% des voix contre 44,3% pour Chamisa. La Zanu-PF a gagne six des 10 provinces du pays tandis que quatre sont allées au MDC-A.
Les choses semblent se présenter à l’inverse cette fois-ci. Un sondage conduit par la société londonienne de relations publiques Sabi Strategy Group commanditée par une structure sud-africaine reliée à la famille Oppenheimer crédite Chamisa de 53% contre 40% pour le président sortant. Un exercice qui a concerné un échantillon de 1000 Zimbabwéens et qui est loin de refléter la complexité d’un pays où le clivage entre ruraux et urbains a jusqu’ici profité au parti au pouvoir.