Le retrait fracassant du Mali, du Burkina Faso et du Niger, de la Communauté économique des États d’Afrique de l’ouest (CEDEAO) avec effet immédiat, donne de plus en plus d’élan au projet de construction de l’Alliance des États du Sahel (AES). Forgée dans l’adversité avec la CEDEAO, l’AES qui est née d’une alliance de circonstance s’est vite transformée en alliance idéologique, géographique, politique, voire militaire entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger avec comme parapluie géopolitique, la Russie de Vladimir Poutine.
L’on se rappelle encore que lors du putsch militaire au Niger le 26 juillet 2023, la Guinée fut l’un des tout premiers pays à afficher sans ambiguïté son soutien aux militaires nigériens du CNSP portés par le général Abdourahamane Tiani. À l’instar du Mali et du Burkina Faso, dans un communiqué publié par les militaires du conseil national du rassemblement pour le développement (CNRD) au pouvoir en Guinée depuis le 5 septembre 2021, sous la houlette de Mamadi Doumbouya, la Guinée avait non seulement apporté son soutien au Niger, dénoncé les sanctions, tout en précisant qu’elle ne les appliquera pas. Par delà tout, elle avait mis en garde la CEDEAO contre l’éventualité d’une intervention militaire dont « les conséquences risqueraient de désintégrer la CEDEAO ».
Six mois après, il n’y a pas eu d’intervention militaire au Niger mais cela n’a pas empêcher le Mali, le Burkina Faso et le Niger, réunis au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES), de chaquer la porte. Même s’il leur est opposable un délai de rétraction d’un an, dans les faits, les trois pays ne se sentent plus, tout au moins politiquement, concernés par les décisions de l’organisation sous-régionale. Les sanctions économiques et financières sans précédent, imposées aux trois pays, leur ont vraisemblablement faciliter la prise de cette décision.
La Guinée en quatrième laron a jusque-là apporté un soutien politique indéfectible aux régimes militaires maliens, burkinabè et nigeriens. Leur apportant par ailleurs une assistance commerciale pour contourner le blocus imposé par la CEDEAO. Le port de Conakry aura été d’un soutien vital pour l’économie malienne au moment des sanctions imposées par l’institution sous-régionale. Conakry sert toujours de tête de pont pour les importations maliennes et nigeriennes. Ce regain de collaboration entre Conakry et Bamako avait même fait naître l’idée d’une Confédération Guinée-Mali.
Mais depuis, ce rapprochement tous azimuts a été refroidi par la crise au sein de l’organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) qui a vu la Guinée claquer la porte sous la présidence malienne. D’autres considérations stratégiques y ont sans doute contribué. Alors qu’Assimi Goita désigne la France comme le mal à combattre, tout en s’alignant derrière Moscou, Mamadi Doumbouya lui, déclare à la tribune des Nations unies à qui veut l’entendre » la Guinée n’est ni anti-francais, ni anti-americain, ni anti-russe…mais tout simplement Pro- Guinéenne » et par ricochet Pro-africaine. Confirmant par-là ce qu’il a répété dans de nombreux discours » Nous croyons au panafricanisme « .
Le désormais Général Mamadi Doumbouya a profité de la tribune des Nations unies, en marge de la 78e assemblée générale, en septembre 2023, pour envoyer un message claire aux grandes puissances mais également et surtout à ses alliés Maliens, Burkinabè et Nigeriens qui scellent pour le moment les espoirs d’un rapprochement stratégique dans le cadre de l’AES dans sa forme actuelle. Il n’est pas exclu pour autant que la Guinée qui se retrouverait acculé par la communauté internationale décide de rejoindre l’Alliance sahélienne.
En attendant le Général Mamadi Doumbouya revendique presque fièrement le non-alignement de la Guinée, conscient du poids stratégique de son industrie minière et traitant directement, autant avec les puissances émergentes que les puissances dominantes.
CEDEAO : la Guinée suivra-t-elle les États de l’AES ?
Mamadou Aliou Diallo
Mamadou Aliou Diallo, journaliste, est diplômé de l'ISMGB (Institut supérieur des Mines et Géologie de Boké) avec une licence en Génie Traitement- Métallurgie; Formation en Communication et journalisme à JMJ-Communication. Administrateur du site Guinée économie, Mamadou Diallo écrit dans divers sujets en économie et finance avec un suivi régulier de l’actualité du secteur de l’Energie et des Mines.
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