Le 31 janvier, une circulaire de la Banque centrale du Nigeria (BCN) a annoncé une modification des exigences prudentielles qui supprime la position nette ouverte longue en devises étrangères des banques commerciales, avec effet au 1er février. Pour Moody’s, cette nouvelle disposition n’est pas sans conséquences sur la rentabilité de la banque centrale. Dans un rapport daté du 6 février 2024, l’agence américaine livre une analyse détaillée de la question.
La position nette ouverte représente, rappelle Moody’s, la différence entre les volumes totaux des positions longues et courtes en devises étrangères, prenant en compte les expositions tant au bilan qu’hors bilan. Une position nette ouverte longue indique que les actifs en devises étrangères d’une banque excèdent ses passifs en devises étrangères, tandis qu’une position nette ouverte courte signifie l’inverse.
Avant cette modification, les exigences prudentielles stipulaient que les banques pouvaient maintenir une position courte allant jusqu’à 20 % des fonds propres des actionnaires et une position longue jusqu’à 10 % des fonds propres des actionnaires non affectés par les pertes. La modification exige désormais des banques qu’elles maintiennent 0 % de position longue des fonds propres des actionnaires non affectés par les pertes.
“Cette modification est négative pour la solvabilité des banques nigérianes, du moins à court terme, car elle réduira leur capacité à générer des profits grâce aux gains de réévaluation de devises étrangères”, explique Moody’s.
Pendant la récente dévaluation du Naira, de nombreuses banques ont pu enregistrer d’importants gains de réévaluation. Or, la nouvelle circulaire limite la capacité des banques à bénéficier d’une position nette ouverte longue. La baisse de rentabilité expose également les banques à des pertes potentielles plus élevées associées à des pertes de crédit attendues plus importantes, qui surviennent généralement lorsqu’une monnaie se déprécie de manière significative.
De plus, une rentabilité plus faible signifie que les banques auraient moins de bénéfices retenus pour renforcer les fonds propres, qui seraient réduits en cas de dépréciation de la monnaie locale. L’ampleur de la pression sur la rentabilité variera cependant en fonction de la taille de la position NOP longue de chaque banque.
“À notre avis, le ratio de solvabilité des banques diminuerait dans l’éventualité probable d’une dépréciation supplémentaire de la monnaie sans les gains de réévaluation en devises étrangères habituellement réalisés en maintenant une position nette ouverte longue”, poursuit Moody’s.
La réduction des ratios surviendrait en raison de l’augmentation de l’équivalent en monnaie locale des actifs pondérés par le risque – où les banques ont des prêts en devises étrangères – qui forme le dénominateur du ratio, contre un numérateur du capital réglementaire restant statique dans un scénario de dépréciation. La suppression simultanée de la capacité des banques à limiter l’impact sur le ratio de capital grâce à des profits plus élevés issus des gains de réévaluation des changes serait aggravée dans le cas où les pertes de crédit attendues (PCE) entraîneraient des coûts de provisionnement plus élevés, affaiblissant les profits des banques.
Dans la circulaire, le régulateur a déclaré qu’il avait pris cette mesure car il était préoccupé par la croissance de l’exposition des banques en devises étrangères à travers leurs positions nettes ouvertes longues, créant un incitatif pour les banques à maintenir un excès de dollars américains, conduisant à la spéculation sur les devises étrangères. La circulaire précise que les banques incapables de se conformer feront face à une « sanction immédiate et/ou à une suspension de la participation au marché des changes ».
La circulaire ordonne en outre aux banques de maintenir un stock adéquat d’actifs liquides étrangers de haute qualité tels que des espèces et des titres gouvernementaux pour couvrir les obligations en devises étrangères arrivant à échéance, ainsi que des arrangements de financement de contingence en devises.