De notre Envoyé spécial à Kigali, Nephthali Messanh Ledy
« Comment l’Afrique peut-elle gagner sa place à la table des puissances de demain ? » C’est l’interrogation qui occupe les 48 heures de conférences, débats et rencontres de haut niveau organisés dans le cadre de l’édition 2024 de l’Africa CEO Forum, dont les travaux ont été officiellement lancés ce jeudi 16 mai à Kigali par Paul Kagamé.
« L’Afrique n’a pas besoin de demander une place autour de la table », dira justement le président rwandais devant un parterre de participants, dont son homologue mozambicain Filipe Jacinto Nyusi, et les Premiers ministres de Sao Tomé-et-Principe (Dr. Patrice Emery Trovoada) et de Côte d’Ivoire (Robert Beugre Mambe). « Tout ce qui peut être fait n’importe où dans le monde peut également l’être en Afrique. La question est : pourquoi ne pas simplement le faire ? Nous devons remettre en question le statu quo dans tous les domaines, que ce soit dans les affaires, la politique ou la société civile», a-t-il poursuivi.
« Ces crises nous apprennent des leçons »
En effet, s’est-il défendu, presque 20% de la population mondiale représente aujourd’hui l’Afrique. Bientôt, a-t-il poursuivi, la seule classe moyenne au monde qui continuera de croître est l’Afrique, qui « restera l’un des moteurs économiques du monde ».
Devant cette foule également constituée du président de la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (Badea), Dr Sidi Ould Tah, le président de la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), Serge Ekué, et le président du conseil d’administration d’Ecobank, Alain Nkontchou, Paul Kagamé ne nie tout de même pas les défis de l’heure. Après avoir énuméré certaines des crises auxquelles le continent est confronté ces dernières années, le dirigeant du pays hôte a déclaré que « ces crises nous apprennent des leçons », dont la nécessité pour le secteur public de collaborer avec le privé.
« Les défis communs peuvent être résolus si nous travaillons ensemble », a-t-il aussi affirmé, avant de saluer l’initiative de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). « Plus l’Afrique est unie, plus nos interactions avec les partenaires seront productives », a lancé le président rwandais. Qui a également appelé à « améliorer notre capacité de réfléchir », et de « développer nos chaines de valeurs ».
Au menu, quatre agendas de transformation prioritaires à aborder lors de cette édition de l’Africa CEO Forum : leadership, transformation numérique et intelligence artificielle, intégration continentale, et financement. À travers plus de 60 panels, ateliers public-privé, et tables rondes, les participants débattront et proposeront leur vision pour le futur de l’Afrique.
« On ne peut plus répéter cela aujourd’hui »
Organisé par Jeune Afrique Media Group en partenariat avec la Société financière internationale (IFC), l’Africa CEO Forum est à sa 11e édition cette année, et se tient pour la 2e fois au Rwanda. Un pays dont Amir Ben Yahmed, CEO de Jeune Afrique Media Group, a salué le développement économique.
« En plus d’avoir l’un des taux de croissance les plus stables d’Afrique, le pays n’a cessé de multiplier les réussites économiques inspirantes. Cela montre que, si l’Afrique ne veut pas se retrouver « au menu » des principales économies du monde et avoir « une place à la table » des négociations mondiales, elle doit accorder une priorité absolue au leadership, à la gouvernance et à la transparence », a déclaré Amir Ben Yahmed, par ailleurs président de l’Africa CEO Forum.
Intervenant à sa suite, Francis Gatare, CEO de Rwanda Development Bank a salué, pour sa part, la tenue d’un « forum productif », tout en lançant un appel à l’investissement dans son pays.
En ce qui le concerne, Makhtar Diop, CEO de l’IFC, a souligné la nécessité de ce type de fora où les leaders écoutent le secteur privé, et vice-versa. « ll y a 10 ans, l’on disait que l’Afrique peut. On ne peut plus répéter cela aujourd’hui. Mais plutôt, l’Afrique est, l’Afrique crée », dira-il. Puis d’ajouter que le continent crée de l’emploi, nourrit sa population, et elle développe un secteur privé résilient.
« La question que nous devons maintenant nous poser est de savoir comment l’Afrique peut saisir les opportunités offertes par la révolution technologique qui est en train de remodeler notre façon de vivre, de travailler et de faire des affaires. L’intelligence artificielle devient rapidement une technologie courante, comparable à l’électricité d’il y a un siècle. Elle a le potentiel de révolutionner la production de biens et de services », a dit l’ancien ministre de l’Économie et des Finances du Sénégal.
« Nous devons devenir propriétaire de nos problèmes et écrire notre propre histoire », a-t-il conclu, paraphrasant le président Paul Kagamé.