La deuxième édition du Symposium Économique Africain (AES) s’est ouverte le 11 juillet 2024 au Policy Center for the New South de Rabat, un think tank affilié à l’Université Polytechnique Mohammed VI. Cet événement réunit des économistes de renom venus d’Afrique et du monde entier, sous le thème « Fostering Africa’s Economic Transformation through Innovative Financing », soit “Favoriser la transformation économique de l’Afrique grâce à des financements innovants”.
Ce symposium vise à devenir un rassemblement annuel de référence, réunissant économistes et universitaires pour discuter des défis de la gestion macroéconomique et des questions structurelles influençant l’avenir du développement économique de l’Afrique, comme l’explique Karim El Aynaoui, Président Exécutif du Policy Center for the New South.
Le contexte actuel, marqué par une crise multidimensionnelle, exige des solutions innovantes pour stimuler la transformation économique de l’Afrique. Intervenant à l’entame du symposium, Abebe Aemro Selassie, Directeur du Département Afrique du Fonds Monétaire International (photo), a rappelé la conjoncture difficile de nombreux pays africains, confrontés à l’inflation, à la montée de la dette publique et à la baisse de leurs réserves.
Ces crises placent souvent la banque centrale en porte-à-faux avec les décideurs politiques, ce qui a expliqué les limogeages des gouverneurs des banques centrales d’Egypte, d’Algérie et de Tunisie. Ce dernier pays est même revenu sur ses acquis, décrétant que la banque centrale peut directement financer l’Etat. C’est dire que sous pression, les pouvoirs publics sont parfois tentés par des solutions populistes aux bénéfices politiques immédiats mais aux effets dévastateurs à termes . Le Zimbabwe qui avait décidé d’utiliser la planche à billet à volonté est retombé dans une hyper-inflation coûteuse pour les ménages et les agents économiques en général. Les enjeux sont importants.
D’où la recommandation d’une plus grande transparence des banques centrales dans la fixation des taux et l’importance de l’innovation financière pour surmonter les défis économiques actuels. Professeur à l’Université Mohammed VI, Mehdi Bartal a dirigé une session sur les défis de la politique monétaire, discutant de l’inflation anticipée et des impacts des taux d’intérêt élevés sur les économies africaines. Pour sa part, Christopher Adam, Professeur à l’Université d’Oxford, a insisté sur la flexibilité des systèmes de change et de l’accumulation de la dette souveraine, soulignant l’importance de la discipline fiscale.
Quant à Christoph Weiss, Conseiller Principal au Département Économique de la Banque Européenne d’Investissement (photo ci-dessous), il a relevé la synchronisation des augmentations des taux d’intérêt en Afrique et l’impact de l’inflation alimentaire post-pandémie.
Percutant durant son intervention, Hassan Hachimi Alaoui, Professeur à l’Université Ibn Zohr, a estimé que la plupart des indices de prix actuels ne reflètent pas toujours les disparités régionales, ce qui nécessite une mise à jour des coefficients de pondération utilisés dans le panier de la ménagère pour mieux représenter le coût de la vie dans différentes régions.
Les économistes ont en gros évoqué le besoin de transparence dans les modèles de prévision de l’inflation et la fixation des taux directeurs. L’accent a aussi été mis sur l’élimination des contraintes politiques à l’investissement pour encourager le secteur privé. La nécessité de renforcer les économies nationales et d’attirer davantage d’investissements directs étrangers (IDE) a également été discutée tout comme la mise en place de cadre adéquats pour la finance verte.
Au terme de la première journée, le consensus qui se dégage des débats porte sur la nécessité d’une coordination étroite entre les politiques monétaires et prudentielles pour assurer la stabilité financière et économique du continent.
Le symposium s’est poursuivi le 12 juillet avec des discussions sur la gestion des ressources financières limitées face aux besoins croissants de développement économique, en explorant les moyens d’augmenter les investissements privés et d’améliorer la capacité productive des économies africaines.