« Entre la justice et ma mère, je choisis ma mère », déclarait Albert Camus, évoquant ainsi un dilemme moral ancré dans les sentiments humains les plus profonds. En ce samedi 3 août 2024, à Nouakchott, la capitale mauritanienne, cette citation a été revisitée par deux écrivains d’envergure : Mbarek Ould Beyrouk, figure emblématique de la littérature mauritanienne, et Gaston Kelman, écrivain franco-camerounais reconnu pour son audace intellectuelle.
Invités du « Grand Débat de Financial Afrik », ces deux auteurs ont substitué le terme « justice » par « liberté », ouvrant une réflexion sur la hiérarchie des valeurs dans une Afrique en pleine mutation. Mbarek Ould Beyrouk, dont les œuvres littéraires traversent les paysages arides de la Mauritanie pour explorer les tourments de l’âme humaine, a, au fil de ses écrits, illustré l’âpre quête de liberté qui anime ses personnages. Lauréat de plusieurs distinctions littéraires prestigieuses, dont le Prix Les Afriques en 2023, son parcours est celui d’un conteur habile, capable de donner vie à des récits à la fois personnels et universels.
Gaston Kelman, quant à lui, s’est fait connaître par son essai provocateur « Je suis noir et je n’aime pas le manioc », où il démonte les stéréotypes sur la communauté noire avec une franchise déconcertante. Son ouvrage, « Les hirondelles du printemps africain », publié en 2007, fait écho aux révolutions politiques et économiques qui continuent de redéfinir le destin du continent africain. Par cette œuvre, Kelman s’affirme comme un visionnaire, anticipant les bouleversements qui secouent l’Afrique d’aujourd’hui.
La rencontre de ces deux voix, venues de deux Afriques différentes mais unies par une même passion pour la liberté et l’engagement, dépasse les frontières géographiques pour offrir un dialogue d’idées riche et nuancé. En revisitant la réflexion de Camus, Ould Beyrouk et Kelman nous rappellent que, pour l’Afrique, la liberté reste un choix impératif, au-delà des considérations de justice, un idéal pour lequel il vaut la peine de se battre, même si cela signifie parfois faire des choix. Au final, lequel, du fougueux Bassa du Cameroun, le continent, ou du fier bédouin d’Adrar, tous deux s’exprimant dans la langue de Molière est le plus aliéné ? C’est selon.