Au troisième jour du Forum de haut niveau sur le pastoralisme au Sahel et en Afrique de l’ouest (‘Nouakchott+10’), les participants –décideurs politiques, représentants des organisations pastorales et agro-pastorales, membres du secteur privé, organisations régionales et de la société civile, venant du Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Libéria, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone, Tchad, et Togo— ont lancé un appel pour un engagement ambitieux à construire la paix et le développement des territoires ruraux, pastoraux et agro-pastoraux au Sahel et en Afrique de l’ouest. Collectivement, ils ont exprimé la nécessité de valoriser les différents systèmes d’élevage et de renforcer la complémentarité entre l’agriculture et l’élevage qui constituent ensemble le socle le plus solide pour le développement inclusif et durable des économies nationales et de l’économie régionale.
Ce Forum intervient dix ans après la première Déclaration de Nouakchott de 2013, qui appelait à sécuriser les modes d’existence et les moyens de production des populations pastorales et d’accroître le produit brut des activités d’élevage, en vue d’augmenter significativement les revenus des pasteurs.
« En ne comptabilisant que les projets régionaux coordonnés par notre institution, plus d’un milliard de dollars ont été investis, entre 2013 et 2024, dans les infrastructures, l’amélioration de la santé animale et l’accès aux services, grâce au soutien technique et financier du Groupe de la Banque mondiale et d’autres partenaires », a déclaré Dr Abdoulaye Mohamadou, Secrétaire Exécutif du Comité permanent Inter-Etat de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILSS).
Les participants ont dressé un bilan globalement positif des progrès réalisés. Au cours des dix dernières années, plus de 13 millions d’hectares d’espaces pastoraux ont été placés sous gestion durable, 559 points d’eau supplémentaires ont été réalisés, et près de 4 200 km de couloirs de transhumance balisés et sécurisés. En matière de santé animale, plus de 600 millions d’animaux ont été vaccinés, 137vétérinaires ont été formés, et 415 parcs de vaccination supplémentaires ont été construits. Les infrastructures marchandes ont été renforcées avec la construction de 362 marchés à bétail supplémentaires, et des actions ont été menées pour l’inclusion économique et sociale de près de 56 000 personnes, dont plus de 86% de femmes, qui ont pu renforcer et diversifier leurs activités économiques.
Cependant, des défis persistants, liés notamment au changement climatique, à l’insécurité et à la pression foncière, continuent de menacer la viabilité de ces systèmes de production, soulignant la nécessité d’une action collective renforcée et à l’échelle, notamment afin de faciliter la mobilité.
Le Forum Nouakchott+10 marque une étape décisive pour l’avenir de millions de personnes qui dépendent directement du secteur vital du pastoralisme et de l’agropastoralisme. Face aux enjeux, les participants ont convenu de sécuriser les terres agro-pastorales, d’améliorer la gouvernance foncière, et de développer des chaînes de valeur durables pour renforcer la résilience des systèmes pastoraux et agro-pastoraux. Ils ont aussi convenu de promouvoir des synergies entre agriculture et élevage, de renforcer l’inclusion l’insertion des jeunes et des femmes dans les activités pastorales et agricoles, et de valoriser les systèmes d’information régionaux pour mieux informer les prises de décision politique. Ils ont appelé à intégrer les besoins des pays côtiers et de certains pays de l’Afrique centrale dans les efforts de développement, en s’appuyant sur la complémentarité entre les systèmes d’élevage sédentaires et mobiles pour une gestion pacifique des territoires.
Les participants au Forum de Nouakchott+10 demandent au Président en Exercice du CILSS de porter cette Déclaration auprès de ses pairs.
« Pour la Mauritanie, pays agro-pastoral par excellence, l’action africaine commune, à tous les niveaux, est un objectif stratégique prioritaire. La nouvelle Déclaration de Nouakchott matérialisera et renforcera la solidarité régionale en faveur du pastoralisme et du développement socio-économique intégré » a dit Moctar Al Housseynou LAM, Ministre Secrétaire Général du Gouvernement de la République Islamique de Mauritanie.
Les représentants des pays se sont engagés à apporter le soutien politique requis, tout en mobilisant des ressources financières et humaines conséquentes, tant internes qu’externes, pour permettre la mise en œuvre de leur engament. En outre, ils ont affirmé leur détermination à mobiliser des investisseurs privés pour encourager le développement des chaînes de valeur animales, notamment dans les segments de l’approvisionnement en aliments pour le bétail, ainsi que dans la production de viande et la collecte et transformation du lait local. Ils ont demandé au Président en exercice du CILSS de porter la nouvelle Déclaration auprès de ses pairs de la sous-région.
Les partenaires présents ont exprimé leur soutien aux conclusions du Forum, et se sont engagés à poursuivre leur accompagnement technique et financier pour leur mise en œuvre.
« Notre mission collective est de valoriser le rôle stratégique des territoires sahéliens dans l’économie régionale, et de promouvoir l’élevage mobile non seulement pour le lait, la viande et autres produits, mais aussi pour les services qu’il rend à l’ensemble de la société sahélienne et ouest africaine, notamment vis-à-vis du changement climatique », a insisté Chakib Jenane, Directeur du développement durable pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre à la Banque mondiale. Il conclut sur l’importance d’accorder une place importante au pastoralisme dans les politiques continentales : « Nouakchott+10 doit adresser des messages forts à la Commission de l’Union Africaine, afin de renforcer la place du pastoralisme dans les politiques régionales et d’apporter un appui significatif à nos communautés pastorales ».