A Lomé, les jalons d’une coopération énergétique ont été posés à la faveur du premier sommet de la coopération énergétique de l’Afrique de l’ouest abrité par la capitale togolaise.
« Nous sommes ici non seulement pour débattre de nos défis énergétiques, mais aussi pour poser ensemble les jalons d’un avenir énergétique prospère et durable pour nos populations ». Cette déclaration de Victoire Tomegah Dogbé, premier ministre du Togo à l’ouverture du sommet axé sur le thème « Renforcer la croissance de l’Afrique grâce à des partenariats énergétiques stratégiques », annonçait les couleurs d’une rencontre capitale pour la région. Il a lieu, faut-il le rappeler, dans un contexte de crise énergétique qui a secoué la région surtout au début de l’année 2024.
Cette crise, dira d’ailleurs le ministre en charge des Ressources énergétiques, Robert Koffi Messan Eklo, a cruellement mis en lumière un défi majeur : la sécurisation de l’approvisionnement énergétique. « Les interruptions d’approvisionnement en gaz naturel ont révélé la fragilité de nos systèmes énergétiques. Nos capacités de production actuelles, principalement thermiques, peinent à satisfaire une demande en constante augmentation. Cette situation engendre des délestages récurrents qui pénalisent nos économies et affectent la qualité de vie de nos populations », a-t-il regretté lors de la cérémonie d’ouverture.
Vision
En poste depuis août dernier, le ministre Eklo se dit porteur d’une vision qui « se veut à la fois ambitieuse et pragmatique, structurée autour de trois axes fondamentaux » destinés à guider une « action collective ». Le premier concerne le développement de solutions énergétiques durables à travers la diversification du mix énergétique. Le deuxième axe vise la stimulation des investissements régionaux par la création d’un « environnement propice aux investissements », et un troisième axe qui met l’accent sur l’innovation technologique.
Ainsi, au cours des différents panels, il est ressorti « qu’il fallait avoir un accès aux investissements structurants dans le secteur de l’énergie pour nos pays », a déclaré Dr Tchapo Singo, directeur général de l’Energie au ministère des Mines et des Ressources énergétiques. Et qu’il faut « avoir une compréhension commune des enjeux énergétiques et des perspectives d’intégration économique avec une définition claire des orientations en matière de sécurisation de l’approvisionnement en combustibles et en énergie ».
De même, cette rencontre régionale de trois jours organisée par EnergyNet Limited aura permis de noter la nécessité de « renforcer les mécanismes de coopération inter-Etats pour adresser les défis communs à toute la sous-région dans le secteur de l’énergie », et de « prendre un engagement pour l’amélioration des réformes politiques et réglementaires afin de soutenir la croissance du secteur énergétique ».
Quid du pipeline gazier Nigeria-Maroc ?
In fine, « mettre un accent sur le développement des compétences et le renforcement des capacités dans le secteur énergétique, afin de garantir une main-d’œuvre qualifiée pour soutenir les projets futurs », et « accroître le rôle du gaz naturel comme une composante clé de l’avenir énergétique de la région, avec des projets comme le pipeline gazier Nigeria-Maroc ».
Ce projet, qualifié d’ailleurs « d’envergure stratégique de portée continentale » par Amina Benkhadra, directrice générale de l’Office national des hydrocarbures et des mines du Maroc (ONHYM) présente aux travaux, concerne en effet 16 pays de la région. « C’est un catalyseur du développement qui va permettre de faire accéder un certain nombre de pays à une énergie durable, qui est le gaz naturel dont disposent de beaucoup de pays dans cette sous-région, notamment le Nigéria, mais également la Mauritanie, le Sénégal, et la Côte d’Ivoire. Il y aura des retombées économiques, sociales et de développement industriel considérables sur la région », a-t-elle indiqué dans une interview avec Financial Afrik.
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Le sommet est organisé autour du thème « Renforcer la croissance de l’Afrique grâce à des partenariats énergétiques stratégiques », une « thématique ambitieuse et profondément pertinente » selon la Banque mondiale représentée par Kwawu Mensan Gaba, directeur sectoriel pour l’énergie en Afrique de l’Ouest pour l’institution.
Panacée
En effet, dans une Afrique de l’Ouest où le taux moyen d’électrification est de 56 %, avec des écarts marqués, la coopération inter-Etat semble une panacée. « Ces disparités, particulièrement criantes entre les zones rurales et urbaines, ralentissent notre développement économique, freinent notre croissance industrielle et affectent le bien-être de nos populations. Pour atteindre l’objectif d’accès universel 2030 avec une sécurité d’approvisionnement en électricité en quantité et qualité suffisantes, il est impératif et urgent de mobiliser d’importants financements et réaliser des investissements massifs dans le secteur de l’électricité », dira M. Gaba.
« L’Afrique de l’Ouest regorge d’un potentiel énergétique important. Nos ressources naturelles – qu’il s’agisse du soleil, de l’éolien, de l’hydroélectricité ou encore de nos nouvelles découvertes gazières – offrent une opportunité exceptionnelle. Cependant, pour transformer ce potentiel en véritable force, il est essentiel d’agir de manière concertée, tout en forgeant des partenariats solides et en mobilisant des investissements audacieux », a ajouté celui dont l’institution revendique plus de 5 milliards de dollars investis dans des projets énergétiques dans la région.
La Banque mondiale a aussi lancé, en avril dernier, l’initiative Mission 300 en partenariat avec le groupe de la Banque africaine de développement dans le but de « mobiliser des financements massifs et innovants pour atteindre l’accès universel à l’électricité dans la région ».