Par Mohamed H’MIDOUCHE, Banquier International, CEO de Inter Africa Capital Group.
Une année de Jubilé d’Or au Service du Développement et de la coopération arabo-africaine
L’année 2024 marque un tournant historique pour deux grandes institutions de développement : la Banque Islamique de Développement (BIsD) et la Banque Arabe pour le Développement Économique en Afrique (BADEA). Célébrant toutes deux leur 50ᵉ anniversaire cette année, elles incarnent l’engagement en faveur du progrès économique et social dans les pays membres de l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI) et de ceux de la Ligue des Etats Arabes (LEA) sur le continent africain.
Deux Jubilés d’Or célébrés à Riyad
Pour marquer ce demi-siècle d’excellence, la Banque Islamique de Développement a organisé une célébration mémorable à Riyad, du 27 au 30 avril 2024, lors de ses Assemblées Annuelles placées sous le thème : « Chérir notre Passé, Tracer notre Avenir : Originalité, Solidarité et Prospérité ». Cet événement symbolique a permis de mettre en lumière les contributions remarquables de la BIsD à la promotion du développement socio-économique au sein de ses 57 pays membres.
Reconnue comme la principale Banque multilatérale de développement dédiée à la coopération Sud-Sud, la BIsD s’est imposée au cours de ces cinq décennies comme un acteur incontournable dans le financement d’infrastructures, le renforcement des capacités humaines, et la lutte contre la pauvreté, consolidant ainsi son rôle stratégique dans les régions qu’elle dessert.
De son côté, la BADEA a également à célébré à Riyadson 50ᵉ anniversaire le 19 mai 2024. Cet événement a souligné un parcours exemplaire marqué par un engagement indéfectible en faveur du développement économique et social en Afrique.
Depuis sa création, la BADEA a contribué à consolider les relations arabo-africaines en promouvant les investissements et les échanges commerciaux entre les deux régions. Son rôle s’est renforcé depuis 2015 avec un focus accru sur le financement du secteur privé et du commerce, ayant approuvé plus de 5 milliards de dollars pour des opérations critiques. Ces efforts illustrent l’impact de la BADEA dans des secteurs stratégiques tels que les infrastructures, l’agriculture, et l’énergie, en répondant aux priorités de développement du continent africain.
Sa mission repose sur le renforcement de la coopération économique, financière et technique entre les régions arabes et africaines, incarnant la solidarité arabo-africaine fondée sur l’égalité et l’amitié. Grâce à sa gouvernance robuste, la banque est uniquement habilitée à prêter aux pays non actionnaires situés en Afrique, jouant ainsi un rôle de catalyseur pour les fonds de développement arabes destinés à l’Afrique et contribuant ainsi à la prospérité commune des deux régions.
Un Leadership Visionnaire et un Profil Financier Solide
Récemment, la BADEA a vu sa note de crédit « AAA » à long terme en devises étrangères confirmée par la Japan Credit Rating Agency (JCR), avec une perspective stable. Cette notation exceptionnelle reflète la solidité financière et la gestion rigoureuse de l’institution. Selon Dr. Fahad Abdullah Aldossari, Président du Conseil d’administration de la BADEA, « Cette notation témoigne du soutien inébranlable des actionnaires et de l’engagement de la BADEA pour les cinq prochaines décennies.»
Pour sa part, Dr. Sidi Tah, Président de la BADEA, a déclaré que cette note est le résultat d’une discipline financière exemplaire et d’une gestion conservatrice des risques. Il a souligné que la banque continuera d’utiliser cette notation pour mobiliser des fonds à des taux très compétitifs afin d’élargir ses capacités de financement en faveur de l’Afrique.
Notons que depuis sa création en 1974, la BADEA a maintenu une structure d’actionnariat stable, tout en augmentant progressivement son capital autorisé, passé de 231 millions USD à 20 milliards USD en 2022.
Le rôle central de la BADEA dans la coordination de l’appui des pays arabes à l’Afrique et son statut de créancier privilégié sont d’autres facteurs qui ont contribué à cette notation.
Au mois de février 2024, la BADEA a réalisé avec succès sa première « obligation sociale » de 500 millions d’euros, une émission qui a été sursouscrite près de trois fois marquant ainsi son entrée remarquée pour la première fois sur le marché financier international.
Lancement par l’Union Africaine et la BADEA du Consortium financier arabo-africain pour stimuler le financement du développement du continent
Lors de la deuxième célébration du 50èmeanniversaire de La BADEA organisée à Accra au Ghana le 20 juillet 2024 en marge de la 6èmeRéunion de Mi-année de l’Union Africaine sous le thème « Prospérité par le partenariat : 50 ans de coopération arabo-africaine pour le développement », une étape importante a été franchie dans les relations économiques entre les pays arabes et africains avec l‘annonce de la création du Consortium Financier Arabo-Africain (AAFC) dont l’objectif est de réunir des institutions financières des deux régions afin de promouvoir une coopération économique, financière et technique accrue en vue de renforcer les investissements et de promouvoir le développement durable.
Le Rôle Stratégique du Groupe de Coordination Arabe
Les célébrations de 2024 ont également mis en évidence le rôle clé du Groupe de Coordination Arabe (GCA) dans le renforcement de la coopération arabo-africaine. Créé en 1975, le GCA regroupe dix institutions multilatérales et nationales, dont la BIsD et la BADEA. Ensemble, ces institutions coordonnent leurs efforts pour maximiser l’impact de leurs interventions en Afrique.
En novembre 2023, le GCA a annoncé une initiative majeure visant à mobiliser jusqu’à 50 milliards de dollars américains d’ici 2030 pour soutenir des infrastructures résilientes et des sociétés inclusives en Afrique. Ces engagements ciblent des secteurs stratégiques, notamment la transition énergétique, l’intégration régionale, la sécurité alimentaire et l’autonomisation des femmes et des jeunes.
50 Ans de Partenariats et de Progrès
L’année 2024 ne se résume pas à une simple célébration; elle symbolise un héritage de solidarité et de prospérité partagée entre le monde arabe et l’Afrique. Alors que la BIsD et la BADEA célèbrent leurs réalisations, elles tracent également une feuille de route ambitieuse pour l’avenir. Ensemble, elles prouvent que la coopération Sud-Sud est un levier puissant pour construire un avenir plus inclusif et durable.
Origines du groupe
Créé en 1975 au Koweit au siège du Fonds koweïtien pour le développement économique arabe, il a pour objectif principal d’ atteindre une plus grande efficacité dans l’assistance à travers l’utilisation optimale des compétences et des capacités disponibles dans les institutions du groupe, la coordination des procédures de financement et d’accompagnement, en particulier en ce qui concerne les grands projets et programmes qui dépassent les capacités d’une seule institution, d’atteindre des objectifs communs et d’établir un lien clair entre l’aide au développement et les autres relations économiques dans les pays bénéficiaires.
Le Groupe tient annuellement deux réunions au niveau des responsables des opérations, dans le but de se concerter sur les initiatives, de coopérer dans le domaine de l’échange d’informations et de données sur les projets et les plans de développement, d’harmoniser les procédures pour éviter les doubles emplois et les répétitions, et d’assurer le financement nécessaire à l’établissement des projets prioritaires. Son Secrétariat de coordination est assuré par le Fonds arabe pour le développement économique et social (FADES).
Composition
Le groupe de coordination comprend actuellement dix institutions, dont quatre nationales: le Fonds koweïtien pour le développement économique arabe, le Fonds saoudien pour le développement, le Fonds d’Abu Dhabi pour le développement et le Fonds du Qatar pour le développement. Il comprend également six institutions régionales: le Fonds arabe pour le développement économique et social, (FADES), la Banque islamique de développement (BIsD), le Fonds de l’OPEP pour le développement international (OFID), la Banque arabe pour le développement économique en Afrique(BADEA), le Programme arabe du Golfe pour le développement (AGFUND), et le Fonds monétaire arabe(FMA).
Ces institutions collaborent pour mobiliser des ressources financières et fournir des solutions innovantes qui répondent aux besoins prioritaires des pays africains. À travers des interventions ciblées, elles ont permis de financer des projets d’envergure, renforçant les infrastructures et facilitant l’intégration régionale.
Nouveaux engagements financiers du Groupe de Coordination Arabe en Afrique
Dans le cadre du renforcement de son soutien aux pays partenaires africains et avant la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28), le Groupe de coordination arabe avait annoncé à Riyad le 9 novembre 2023 son initiative visant à allouer un montant pouvant atteindre 50 milliards de dollars américains jusqu’en 2030 pour aider à construire des infrastructures pour soutenir la résilience et des sociétés inclusives pour tous sur le continent africain.
Cette annonce a été faite par Son Excellence le président du Groupe de la Banque islamique de développement (BID), Dr Mohammed bin Sulaiman Al-Jasser, lors de la conférence économique accompagnant le sommet saoudo-africain, qui s’est tenue à Riyad le 9 novembre 2023.
Considérant que de nombreux pays africains sont particulièrement vulnérables aux impacts du changement climatique, et qu’il est urgent de renforcer la résilience et l’adaptation à ces changements, les financements alloués au groupe soutiendront des initiatives dans de nombreux domaines tels que : la sécurité énergétique, la transition énergétique, le renforcement de l’intégration régionale et de la communication, le financement et la facilitation du commerce, les initiatives visant à autonomiser les femmes et les jeunes et à créer des opportunités d’emploi et d’éducation pour eux, le renforcement du soutien aux États fragiles, l’amélioration de l’efficacité du développement, le financement du secteur privé et la sécurité alimentaire, la lutte contre la pauvreté et le chômage.
Répartition sectorielle des engagements du GCA en Afrique
Il convient de noter que c’est la BADEA qui assure la supervision de l’équipe de travail du GCA chargée de mettre en œuvre ce nouvel engagement financier historique, principalement destiné à l’Afrique subsaharienne et réparti dans les secteurs suivants :
• Transports et communications : Environ 70 % des investissements ont été consacrés à des projets visant à améliorer la connectivité entre les villes et les zones reculées.
• Énergie : Financement de projets énergétiques dans des zones vitales pour soutenir le développement économique.
• Agriculture et élevage : Projets axés sur la sécurité alimentaire et le renforcement du développement rural.
• Eau et assainissement : Initiatives visant à améliorer l’accès à l’eau potable et aux services d’assainissement pour les populations.
• Développement du secteur privé.
• Financement du commerce.
Ces engagements témoignent de la contribution significative du GCA au développement économique et social de l’Afrique, en mobilisant des ressources financières substantielles pour soutenir des projets clés dans divers secteurs.
50 ans de développement, 50 ans de partenariats
L’année 2024 est bien plus qu’une simple célébration; elle symbolise un héritage de 50 ans au service de la prospérité partagée et de la solidarité entre les nations. La BIsD et la BADEA, chacune à leur manière, ont su incarner les valeurs de coopération, d’innovation, et de développement durable.
Alors que ces institutions célèbrent leurs accomplissements, elles tracent également la voie pour des partenariats stratégiques renforcés. Ensemble, elles démontrent que les alliances Sud-Sud, en particulier celles favorisées par le Groupe de Coordination Arabe, sont des leviers puissants pour bâtir un avenir où la prospérité et l’équité sont accessibles à tous.
Perspectives : Forum d’Abidjan 2025
Ces festivités s’inscrivent dans un contexte de réflexion sur l’avenir de la coopération arabo-africaine, avec en ligne de mire le Forum d’Abidjan prévu les 27 et 28 janvier 2025. Organisé par Financial Afrik en partenariat avec la BADEA sous le thème « Le Monde Arabe et l’Afrique : Investissements et Commerce », cet événement constituera une plateforme stratégique pour renforcer les partenariats économiques et commerciaux entre les deux régions, tout en répondant aux défis de l’intégration et de la compétitivité dans un monde en constante mutation.