Par Abderrahmane Mebtoul, Professeur des universités, expert international
Les relations entre l’Algérie et la France connaissent actuellement de fortes turbulences, chaque pays défendant ses propres intérêts. Dans le cadre des relations internationales, où les sentiments cèdent la place aux intérêts stratégiques, il est essentiel pour les deux nations de combattre ensemble la violence et l’extrémisme sous toutes leurs formes, notamment à travers les cyberattaques, qui nécessitent d’urgence un cadre juridique mondial de protection. Je partage avec de nombreuses personnalités de divers horizons l’espoir de voir ces tensions s’apaiser et la raison l’emporter sur les passions, particulièrement en ces moments de fortes tensions régionales.
Selon le Trésor français, en 2022, la France était le troisième client de l’Algérie (10,5 % du total des échanges), derrière l’Italie (32,3 %) et l’Espagne (12 %). La Chine est le premier fournisseur de l’Algérie avec 18,6 % des parts de marché, suivie de la France (14 %) et de l’Italie (7,7 %). L’Algérie occupe le 21ᵉ rang des partenaires commerciaux de la France, en étant son 25ᵉ client et son 20ᵉ fournisseur. En 2023, les exportations algériennes vers la France ont progressé de 15,3 % pour atteindre 6,18 milliards de dollars, représentant 13 % des exportations algériennes d’hydrocarbures (51,8 % de gaz et 48,2 % de pétrole brut). Par ailleurs, de nombreuses entreprises françaises opèrent en Algérie dans des secteurs stratégiques tels que les transports, l’automobile, l’agroalimentaire, la banque, l’assurance et la pharmacie.
Sur le plan humain, la diaspora algérienne en France est fortement implantée, rendant les relations entre les deux pays sensibles et complexes. Majoritairement intégrée et respectueuse des lois du pays d’accueil, cette diaspora contribue significativement à l’économie française. Selon Patrick Simon, chercheur à l’INED, le nombre d’immigrés algériens et de leurs descendants en France est estimé entre 4 et 4,5 millions, bien loin des 7 millions avancés par certains médias.
Par ailleurs, selon un communiqué de la présidence algérienne du 13 janvier 2025, une réunion a été consacrée à la révision de l’accord d’association avec l’Union européenne (UE), premier partenaire commercial de l’Algérie. En 2023, l’UE représentait 50,6 % du commerce extérieur algérien. Malgré une diminution des exportations algériennes de 22,3 milliards d’euros en 2015 à 14,9 milliards en 2023, le volume des échanges a augmenté de plus de 20 % en 2023 par rapport à 2022. L’Algérie est également devenue en 2023 le deuxième fournisseur de gaz de l’Europe (19 %), derrière la Norvège et devant la Russie, grâce aux infrastructures Medgaz (via l’Espagne) et Transmed (via l’Italie).
En conclusion, la stabilité régionale exige des relations apaisées entre les nations. Le respect mutuel et un dialogue productif entre l’Algérie, la France, et l’Europe sont essentiels pour éviter une déstabilisation du bassin euro-méditerranéen et africain, notamment dans l’espace sahélien en pleine transformation. Comme je l’ai souligné lors d’une conférence au Parlement européen à Bruxelles, l’Algérie et l’Europe, en tant que partenaires stratégiques, ont un rôle majeur à jouer pour garantir la stabilité et la prospérité des deux rives de la Méditerranée.