De gauche à droite : Eng. Sultan Abdulrahman Al-Marshad – PDG du Fonds Saoudien (SFD), Dr. Sidi Ould Tah – Président de la BADEA, Mme Nialé KABA – Ministre du Plan et du Développement de la Côte d’Ivoire, Dr. Abdulhamid Alkhalifa – Président du Fonds de l’OPEP et M. Abdullah Al Mesaibih – Directeur des Opérations du Fonds du Koweït.
[Par Christine Holzbauer, envoyée spéciale ]
La 6ème édition des Financial Afrik (Awards (FAA) s’est tenue à Abidjan les 27 et 28 janvier 2025. Cette édition, la troisième organisée en Côte d’Ivoire, a pris une dimension unique en favorisant un dialogue stratégique entre le monde arabe et l’Afrique. Placée sous les auspices de la Banque Arabe pour le Développement Économique en Afrique (BADEA), cet événement phare pour les leaders de la finance africaine a souligné la nécessité d’établir une feuille de route pour renouveler les partenariats Arabo-Africains afin d’atteindre une prospérité partagée.
Accueillie dans la ville dynamique d’Abidjan, l’édition 2025 des Financial Afrik Awards restera dans les mémoires comme une tentative de concrétiser une ambition collective : mettre en lumière des projets transformateurs, célébrer les réalisations africaines et explorer les synergies entre l’Afrique et le monde arabe pour construire un avenir prospère. Selon le directeur de publication de Financial Afrik, Adama Wade, cette 6ème édition offre une « opportunité unique » aux participants africains venus de tout le continent et d’outre-mer pour rencontrer des fonds arabes. À un moment charnière pour ces derniers puisque le Groupe de Coordination Arabe (ACG), sous la coordination du Dr. Sidi Ould Tah, président de la BADEA, célèbre cette année le 50ème anniversaire de sa création, et est plus déterminé que jamais à renforcer sa présence en Afrique. « Ensemble, ces deux régions peuvent redéfinir le paysage économique mondial, créer des opportunités sans précédent et poser les fondations d’une prospérité partagée. Une alliance prometteuse se dessine. Nous devons saisir cet élan », a-t-il ajouté. Les nations arabes, en particulier celles du Golfe, disposent d’une immense puissance financière. Leurs fonds souverains, tels que l’Autorité d’Investissement d’Abou Dhabi (993 milliards de dollars d’actifs sous gestion), le Fonds d’Investissement Public saoudien (778 milliards) et le Qatar Investment Authority (475 milliards), reflètent un potentiel d’investissement colossal. Ces ressources sont renforcées par d’importants excédents commerciaux alimentés par les exportations d’hydrocarbures.
D’autre part, l’Afrique, un continent riche en ressources naturelles et humaines, offre un terrain fertile pour les partenariats économiques. Des nations comme la Côte d’Ivoire, avec son économie en croissance rapide, illustrent une Afrique ambitieuse attirant des investissements dans des secteurs stratégiques tels que l’agriculture, l’infrastructure et la technologie.
L’exemple de la Côte d’Ivoire
S’adressant à l’assemblée des investisseurs africains et arabes, la ministre ivoirienne de l’Économie, du Plan et du Développement, Nialé Kaba, a souligné la nécessité de transformer les principaux atouts que son pays détient tels que l’agriculture, l’énergie renouvelable, la technologie et l’éducation en une croissance durable et inclusive : « La Côte d’Ivoire, comme de nombreux autres pays africains, est au cœur d’une nouvelle dynamique. Elle symbolise une Afrique qui ne se contente plus d’être un exportateur de matières premières mais qui est déterminée à devenir un leader en innovation et en développement durable », a-t-elle déclaré dans son discours inaugural. Malgré de nombreuses opportunités, les échanges commerciaux entre le monde arabe et l’Afrique restent modestes, ne totalisant que 28 milliards de dollars en 2022. Par conséquent, l’intégration économique et financière doit être renforcée pour exploiter pleinement le potentiel existant. Des institutions clés telles que la BADEA, Afreximbank, la Banque Ouest-Africaine de Développement (BOAD), et la Banque d’Investissement et de Développement de la CEDEAO (BIDC) peuvent jouer un rôle crucial dans ce processus. Ces institutions incarnent l’intégration régionale et transcontinentale en finançant des projets transfrontaliers et en facilitant le commerce.
Construire une nouvelle feuille de route
Les deux premières tables rondes ont discuté des initiatives récentes pour « Faire le pont entre les marchés et mobiliser le capital pour la croissance » et « Exploiter la force collective pour un développement durable » La création par les Émirats Arabes Unis d’un fonds de 5 milliards de dollars pour l’infrastructure africaine et l’engagement du Groupe de Coordination Arabe (ACG) à mobiliser 50 milliards de dollars pour des projets de développement sont des exemples concrets de cette détermination partagée à construire une nouvelle feuille de route. En plus du président de la BADEA, les panélistes du côté arabe étaient Sultan Abdulrahaman Al-Marshad, CEO de SFD, Dr Abdulhamid Alkhalifa, président du Fonds OPEP, Abdullah Al Mesaibih, directeur des opérations du Fonds du Koweït, et Sheikha Haya Abdulrahman Al-Tani, gestionnaire du département stratégique du Fonds du Qatar. Tandis que du côté africain, Serge Ekue, président de la BOAD, Abdourahmane Diallo, DG de FSA, Dr. George Agyekum Donkor, président de la Banque d’Investissement et de Développement de la CEDEAO (BIDC), et Thierno-Habib Hann, PDG de Shelter Africa, ont participé aux discussions. Dr. Zul Kifl Salami a apporté le point de vue d’un économiste sur la manière de stimuler les échanges et de tirer pleinement parti des partenariats stratégiques, puisqu’il est lui-même à la croisée des deux mondes.
Parmi les secteurs clés qui devraient faire l’objet d’une attention particulière, il a été mentionné : exploiter les vastes terres arables de l’Afrique, développer les énergies renouvelables pour combattre le changement climatique, les nouvelles technologies et l’éducation, qui sont les moteurs de l’innovation et de la compétitivité pour la jeunesse africaine.
Nouveaux défis à relever Les nombreuses opportunités d’investissement entre le monde arabe et l’Afrique que les Partenariats Public-Privé (PPP) représentent ont été soulignées par tous les participants. Parmi eux, Mohamed Abdellahi Ould Yaha, président de Maurilog, firme mauritanienne leader dans le local content du secteur pétrolier et gazier, Khalid Al Aboodi, conseiller principal du CEO de Saudi EXIM, Dr. Tarifa Alzaabi, DG de ICBA, Edmond Adjikpe, Représentant Régional de Shelter Africa, Latifa El Bouabdellaoui, Directrice Générale du Centre islamique pour le développement du commerce (ICDT), Pierre Goudiaby, président du Groupe ATEPA, Jerome Ehui, DG de Versus Bank et président de l’Association des banques et établissements financiers de Côte d’Ivoire (APBEF-CI), et Tshepidi Moremong, directrice d’exploitation d’Africa 50.
Cependant, comme il a été souligné lors du panel, près de 80% des projets de PPP échouent en raison du manque de financement à la phase de faisabilité. Ainsi, la nécessité de répondre à ces besoins avec du capital-risque que la plupart des institutions financières ne fournissent pas. Le dernier panel était consacré au rôle des banques, des marchés de capitaux et de la coopération dans le financement du développement : « Soutenir le financement des entreprises, l’industrialisation et l’intégration des chaînes de valeur ». En plus d’améliorer les instruments pour réduire la perception du risque en Afrique, comme l’ont plaidé Lionel Zinsou, cofondateur de Southbridge et Stanislas Zeze, PDG de Bloomfield Investment Corporation, Dr. Felix Edoh Kossi Amenounve, directeur général de la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières (BRVM), a présenté les progrès réalisés à travers le développement des bourses en Afrique.
D’autres panélistes tels que Jean Arsène Yerima, directeur régional d’Afreximbank pour l’Afrique de l’Ouest francophone, Riad Naouar, Directeur régional de l’IFC, Geraldine Mermoux, managing partner de FINACTU, ainsi que Bocar Sy, banquier, ont loué la coopération avec le monde arabe non seulement pour augmenter les flux de trésorerie, mais aussi pour attirer des investissements arabes à long terme dans le secteur privé.