En injectant des fonds dans l’économie, que ce soit par le biais d’investissements publics ou de politiques fiscales expansionnistes, les gouvernements visent à stimuler la demande globale. Cette augmentation de la demande peut aider à dynamiser l’activité économique, en incitant les entreprises à produire davantage pour répondre à cette demande accrue. En conséquence, cela peut conduire à une relance de la croissance économique et une réduction du chômage.
Le concept du multiplicateur keynésien est capital pour comprendre l’impact des politiques de relance économique en période de récession ou de stagnation économique ; lorsque la demande globale est en baisse et que les capacités de production sont sous-utilisées. Le multiplicateur mesure l’impact d’une variation de la dépense publique, des investissements ou d’autres composantes de la demande agrégée sur le produit intérieur brut (PIB) en tenant compte des exportations et surtout des importations.
Le Modèle de base
Les ressources disponibles dans une économie (production intérieure et importations) doivent toujours être égales aux emplois, c’est-à-dire aux différentes utilisations possibles de ces ressources. En économie ouverte, l’équilibre sur le marché des biens et services repose donc sur l’égalité entre l’offre globale det la demande globale. D’où l’égalité suivante :
Y + M = C + I + G + X (1)
– Y (PIB) : représente l’offre globale, soit la production totalede biens et services dans l’économie.
– C (Consommation privée) : représente la demande des ménages pour les biens et services.
– I (Investissement privé) : désigne les dépenses des entreprises pour le capital fixe (usines, machines) et l’investissement des ménages (exemple : logement).
– G (Dépenses publiques) : correspond à la consommation et aux investissements réalisés par l’État.
– X (Exportations) : demande provenant de l’étranger pour les biens et services nationaux.
– M (Importations) : demande intérieure de biens et services étrangers.
L’quation (1) ci dessus peut être réécrite sous une nouvelle forme:
Y = C + I + G + (X – M) (2)
Dans cette équation (2) , (X-M) correspond au solde de la balance commerciale : Si X > M, l’économie réalise un excédent commercial, Si X < M, l’économie subit un déficit commercial.
Le Schéma itératif de l’augmentation des dépenses publiques
Prenons le cas d’une économie caractérisée par les paramètres suivants :
– propension marginale à consommer (c) = 0,8. Ce qui signifie que la consommation augmente de 0,8 unités quand le revenu augmente d’une unité.
– taux d’imposition (t) = 0,2 . C’est-à-dire que les impôts représentent 20% du revenu national.
– propension marginale à importer (m) = 0,3. Ce qui signifie que si le revenu augmente d’une unité, les importations vont augmenter de 0,3 unité.
Maintenant, supposons qu’il y ait une augmentation des dépenses publiques (ΔG) de 20.
Comme le décrit le tableau ci-dessous, l’augmentation des dépenses publiques de 20 va se traduire dans un premier temps (étape 1) par une augmentation du revenu de 20. Sur ces 20, l’Etat va prendre 4 d’impôts. Il va rester aux ménages 16 de revenu disponible desquels ils vont épargner 3,2 et dépenser 12,8. Ce sont ces 12,8 qui constituent la nouvelle demande à satifaire par la production intérieure et les importations. Les importations étant de 6, c’est donc la production intérieure qui va satisfaire le reste ( 12, 8 – 6 = 6,8). Ces 6, 8 constituent une nouvelle augmentation de la production (étape 2). Ainsi de suite, le processus continue jusqu’à la fin (étape 7) ou l’effet multiplicateur devient nul.
L’on s’aperçoit ici, que l’effet multiplicateur est atténué par les fuites que sont les impôts, l’épargne et surtout les importations. En effet, dans ce processus les importations vont augmenter à cause de la corrélation qui exixte entre elles et le revenu national. Elles réduisent, de ce fait, l’impact de l’effet multuplicateur. Ainsi, au bout du processus, comme le montre le tableau, la production nationale a augmenté de 30,3 mais les importations aussi se sont accrues de 9,2.
Une politique de relance en économie ouverte risque souvent de détériorer la balance commerciale car, dans le court terme, les exportations sont supposées constantes.
Schéma itératif : Augmentation du Revenu National suite à l’augmentation des dépenses publiques
Étape | Augmentation du revenu (ΔY) | Augmentation des impôts (t x ΔY) | Augmentation de la consommation (c × (1-t) × ΔY) | Augmentation des importations (m × ΔY) |
1 | 20 | 4 | 12,8 | 6 |
2 | 6,8 | 1,360 | 4,352 | 2,040 |
3 | 2,312 | 0,462 | 1,480 | 0,693 |
4 | 0,786 | 0,157 | 0,503 | 0,236 |
5 | 0,267 | 0,053 | 0,171 | 0,080 |
6 | 0,091 | 0,018 | 0,058 | 0,027 |
7 | 0,031 | 0,006 | 0,020 | 0,009 |
Total | 30,3 | 6,06 | 19,58 | 9,09 |
On aurait pu trouver directement ce résultat (30,3) en utilisantle multiplicateur budgétaire K.
En utlisant les paramètres ci-dessus nous aurons .
Si l’Etat augmente ses dépenses publiques de 20, en appliquant le multiplicateur, on aura :
Augmentation du revenu (ΔY) = 1.515 x Augmentation des dépenses publiques (ΔG) :
ΔY = 1.515 x ΔG = 20 x 1,515 = 30,3.
Le multiplicateur nous indique que, si l’Etat augmente ses dépenses de 1, le revenu national augmente de 1,515. Ainsi donc l’augmention de la production va se traduire par une diminution du chômage.
Bien que l’effet multiplicateur keynésien soit une un outil puissant, son application dans la pratique rencontre plusieurs obstacles. Ces limites, souvent liées à des contraintes structurelles ou contextuelles, diminuent son efficacité. Elles feront l’objet de notre prochaine leçon. In chaa ALLAH.
À propos de Pr Amath NDiaye UCAD-FASEG
Prof. Amath Ndiaye est un éminent économiste sénégalais, titulaire d’un Doctorat d’État en Sciences Économiques de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (2001) et d’un Doctorat de 3e cycle en Économie du Développement de l’Université de Grenoble, France (1987). Depuis 1987, il enseigne à la Faculté des Sciences Économiques et de Gestion de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Expert reconnu, il a collaboré avec des institutions prestigieuses telles que la Banque Africaine de Développement, la Banque Mondiale, et le FMI, se spécialisant notamment dans les domaines des taux de change, de la croissance économique, et du développement institutionnel. Il était expert-membre du comité de pilotage de la Commission de l’Union Africaine pour la Création de la Banque Centrale Africaine.. Prof. Ndiaye est l’auteur de nombreuses publications influentes, notamment sur les régimes de change et la croissance économique en Afrique de l’Ouest. Trilingue, il maîtrise le wolof, le français et l’anglais.